Après ses études en Israël, Daphne Koller est partie aux Etats-Unis. Elle a fait son doctorat à l’Université de Stanford et, aujourd’hui encore, elle donne des cours dans le domaine de l’intelligence artificielle dans cette prestigieuse maison. Sebastian Thrun a fait ses études à Bonn, en Allemagne, avant de rejoindre les Etats-Unis. Il est également professeur à Stanford. En 2005, il a gagné le Darpa Grand Challenge, une compétition mettant en jeu des véhicules terrestres sans pilote et autonomes. A part leur parcours à Stanford, un autre point commun réunit ces deux personnalités. Toutes deux ont fondé une plateforme d’enseignement à distance offrant des cours de niveau universitaire gratuits.
Coursera, créé par Daphne Koller et Andrew Ng, offre depuis avril 2012 des cours de prestigieuses université essentiellement américaines. Des hautes écoles d’autres continents apparaissent aussi dans la liste. Ainsi l’EPFL mettre à disposition les premiers cours en français. Les cours couvrent des champs divers, de l’informatique aux sciences sociales. Udacity, fondé par Sebastian Thrun, propose des cours essentiellement d’informatique, de physique ou de mathématiques. Le cours le plus célèbre est celui qui explique comment réaliser une voiture sans conducteur.
La formation à distance n’est pas nouvelle sur Internet. On peut même dire qu’elle a subit elle aussi le même sort que le commerce électronique sur Internet. Dès les débuts du Web, de nombreuses personnes ont pensé qu’Internet jouerait un rôle déterminant dans le commerce et dans l’éducation. Parallèlement au gonflement d’une bulle spéculative qui allait entraîner une première crise grave sur le net, de nombreux programmes et sites d’éducation ont vu le jour. La Suisse avait créé par exemple le Campus Virtuel, qui fut en fait une véritable déconfiture. Jacques Perriault a bien analysé les causes de cet échec dans son livre « L’accès au savoir en ligne » (2002). Les promoteurs de l’éducation sur Internet ne se sont pas intéressés à ce qui s’était déjà fait en matière d’éducation à distance, un domaine qui avait pourtant une longue tradition. Les échecs subis par les premières plateformes d’éducation ont fait long feu et il a fallu attendre longtemps jusqu’à ce que de nouvelles initiatives voient le jour. Seules se sont répandues les systèmes open source comme Moodle permettant à chacun de créer une classe virtuelle.
2012 voit donc l’émergence de plusieurs plateformes importantes. Le succès est immédiat. Lancée en avril, Coursera a plus de 2 millions d’utilisateurs en décembre. Un cours peut attirer entre 40’000 et 50’000 utilisateurs. Le seul cours pour lequel j’ai des données fait état de 2500 certifiés au terme du cours, ce qui représente 5%. Ce pourcentage est un excellent taux d’engagement en ligne, quand on songe à l’investissement en temps et en énergie nécessaire pour assimiler l’enseignement. Le premier cours offert par Udacity en 2011, consacré à la création d’une voiture auto-conduite et donné par Sebastian Thrun lui-même a réunit 160’000 étudiants du monde entier.
Les cours de Coursera et Udacity sont gratuits. Majoritairement en anglais (l’EPFL donnera tout de même un cours en français), ces cours sont très suivis par des étudiants de pays émergents qui n’ont pas accès à ce type d’éducation chez eux. Certains ont même pu trouver un job grâce à leur certificat. Ces nouvelles plateformes doivent maintenant trouver des modèles de financement pour assurer leur avenir. L’un consisterait à faire payer pour la certification seulement. Un autre donnerait la possibilité à de futurs employeurs de détecter des collaborateurs potentiels par rapport aux cours suivis avec succès.
2013 devra confirmer ce renouveau de l’éducation en ligne. J’ai, à titre personnel, suivi un cours de manière complète sur Coursera. Le cours s’intitulait Networked Life et il était donné par un professeur de l’Université de Pennsylvania, Michael Kearns. La matière était passionnante : structure et dynamique des réseaux. La pédagogie excellente : 3 à 4 vidéos de 15 minutes à suivre chaque semaine, des lectures complémentaires et un quizz correspondant à chaque vidéos. Les vidéos elles-mêmes ne montraient pas le professeurs, mais ses diapositives qu’il commentait en voix off et sur lesquelles il écrivait des notes supplémentaires. Petit raffinement sur Coursera, il est possible de ralentir le rythme de la vidéos, permettant à des non-anglophones de suivre plus facilement. Le sentiment de communauté se crée très vite autour d’un forum de discussion et même sur les médias sociaux. Dès qu’une difficulté apparaît, comme une question incomprise dans un quizz, le professeur et son équipe de modérateur peut réagir rapidement. Au terme du cours, j’ai obtenu mon certificat. J’en étais très heureuse, car cela avait supposé un gros investissement en temps et en énergie. Cependant j’ai le sentiment que les connaissances acquises me seront très utiles et je suis prête à recommencer.