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Culture Histoire d'Internet Musée virtuel muséographie virtuelle Tendances

Vieux gadgets

Hardware Zone, un site technologique de Singapoure, fête ses douze ans. Pour marquer le coup, il s’offre une exposition virtuelle en ligne montrant l’évolution des technologies électroniques et numériques. L’exposition est composée de trois parties. La première retrace l’histoire du site. La second offre des frises chronologiques pour plusieurs types d’appareils, de périphérique ou même pour Internet. La troisième partie est participative: les internautes peuvent poster des images de vieux gadgets électroniques qu’ils ont chez eux: polaroïd, gameboy, téléphone portable de première génération, etc… Des prix récompenseront les meilleures images. En regardant cette galerie d’image, on réalise à quel point l’obsolescence est de plus en plus vite atteinte. Un appareil des années 80 semble complètement dépassé.
Gadgets
http://www.celebratetechnology.com.sg/
http://www.hardwarezone.com.sg/
Cette exemple montrer que l’exposition virtuelle n’est pas le fait des seuls musées, mais constitue une forme en soi qui peut être utilisée dans diverses stratégies de communication.

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Bibliothèque virtuelle Culture Musée virtuel muséographie virtuelle

La vie sous-marine

En cette période où la mer est mise à mal par une marée noire qui est certainement l’une des plus grandes catastrophes écologiques de notre planète, il est peut-être bon de s’intéresser à la richesse de la vie sous-marine. Le Smithsonian nous en donne l’occasion, grâce à un site lancée par le Musée national d’histoire naturel. Il s’agit d’un portail consacré à l’océan. Il présente divers aspects de la mer sous une forme attractive, avec de nombreuses images, vidéos et animations. Il montre le travail de chercheurs et offre aussi des ressources pour les enseignants.
Il offre également une perspective chronologique de la vie sous-marine, à travers des timelines. L’un montre l’évolution des cétacés et l’autre  les grands prédateurs marins.
Timeline vie sous-marine
http://ocean.si.edu/

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3D Applications géographiques Culture Musée virtuel muséographie virtuelle Second Life

Une visite de l’île de Pâques

Le vent a commencé à tourner pour les prestigieuses collections amassées par les grands musées occidentaux. Certains pays réclament avec insistance des pièces particulièrement relevantes pour leur passé ou leur culture. La Grèce avait ouvert les feux en demandant le retour des marbres du Parthénon (cette requête date déjà de l’époque où Melina Mercouri était ministre de la culture). L’Egypte veut récupérer le buste de Néfertiti. La Chine essaye de bloquer la vente de certains objets dans des salles d’enchère. Récemment 17 pays se sont réunis dans le but de réclamer le retour de leurs antiquités, sous l’égide de l’Egypte (et de son dynamique responsable du Conseil suprême Antiquités, Zahi Hawass).
Article AFP
Site de Zahi Hawass
Il existe une convention de l’UNESCO dont le but est de lutter contre l’importation, l’exportation et le transfert illicite des biens culturels. Cependant cela ne concerne que les acquisitions faites après 1970. Il n’existe donc aucune base légale pour réclamer des objets qui sont entrés dans les musées avant cette date, comme les frises du Parthénon ou le buste de Néfertiti. Cela n’empêche pas ces pays de réclamer des objets arrivés dans les musées occidentaux avant cette date.
Convention UNIDROIT de l’UNESCO
Les divers peuples du monde sont de plus en plus déterminés à conserver eux-mêmes leur patrimoine, plutôt que de le laisser partir vers l’Occident. Il y a quelques semaines, les habitants de l’île de Pâques ont refusé de prêter un de leurs moai qui devait être exposé à Paris, dans le Jardin des Tuileries.
Article Cyberpresse
Ceci nous ramène à la question du musée virtuel. Un objet du monde réel ne peut se trouver qu’à un seul endroit. Et cet endroit devient de plus en plus discuté. Il faut encore considérer que certains sites sont difficilement accessibles pour des raisons d’éloignement (c’est le cas de l’Ile de Pâques) ou de conservation (Lascaux ou certaines tombes égyptiennes). Dès lors, comment concilier l’intérêt du public pour le patrimoine culturel avec la préservation de ce patrimoine ou les difficultés d’accès. Les technologies de l’information sont peut-être une des clés de cette question. J’ai donc cherché comment il est possible de visiter l’Ile de Pâques et d’admirer ses fameux moai tout en restant chez soi.
Il existe de nombreux sites Internet consacrés à l’Ile de Pâques et à ses mystères. Je me suis intéressée à des représentations en 3 dimensions. Première déception, il n’existe pas (à ma connaissance) de sim reproduisant une partie ou l’ensemble de l’Ile de Pâques dans Second Life. Néanmoins, j’ai pu acheté un moai pour 200 L$. Idéal pour orner une plage, en compagnie de quelques palmiers.
Moai dans Second Life
Plus intéressant est Google Earth. La résolution de l’île est de qualité acceptable, suffisante en tout cas pour apercevoir les ahu, plateformes sur lesquels se dressaient les moai.
Vue aérienne de l’Ile de Pâques
Quelques groupes de moai ont été modélisés en 3 dimensions. Cela permet de se faire une idée de leur localisation dans le paysage. Les statues sont cependant grossières. Fait intéressant, elles tournent le dos à la plage: les moai regardent vers l’intérieur des terres et non vers le large.
Moai dans Google Earth
Pour ceux qui souhaitent voir les statues et leur environnement en détail, ils peuvent se rendre sur le site “360 cities”, spécialisés dans les visions panoramiques en 360 degrés. En fait, cette technologie existe depuis longtemps sur Internet. On la trouve sur de nombreux sites de musées, sous le terme de visite virtuelle. Elle est aussi beaucoup utilisée dans le tourisme, l’hôtellerie et l’immobilier. Le site “360 cities” présentent des vues panoramiques de nombreux sites dans le monde. L’Ile de Pâques est richement représentée: une vingtaine de site peuvent être visités.
Carte 360 cities
http://www.360cities.net/map#lat=-27.11109&lng=-109.34692&zoom=12
Il suffit de choisir un des points pour visualiser le panorama. On peut ensuite faire un tour sur soi-même de 360 degrés et visualiser le paysage, y compris le ciel. On peut aussi accéder à un autre panorama proche dès que l’on voit s’afficher des flèches blanches.
Moai dans 360 cities
La Fundación Telefónica, une fondation chilienne, a produit un site permettant une visite virtuelle de l’Ile de Pâques. Le maire de l’île commence par vous souhaiter la bienvenue. A partir d’une carte, il est possible d’explorer les principaux sites de l’île.
Visite virtuelle de l’Ile de Pâques
Certains sont présentés comme des highlights. On voit sous forme de photographies avec des commentaires.
Visite virtuelle de l’Ile de Pâques
D’autres sites sont présentés sous forme d’animation: on peut découvrir, par exemple, comment étaient sculptés et transportés les moai.
Visite virtuelle de l’Ile de Pâques
Enfin certains endroits sont  montrés en 3 dimensions. La visite est saisissante. Il est possible de se promener autour des moai, dans un paysage avec une excellente résolution (en comparaison avec d’autres univers en 3 dimensions).
Visite virtuelle de l’Ile de Pâques
http://www.fundacion.telefonica.com/arsvirtual/media/visitas/isla_pascua/alta/pascua/index.htm
Chacun de ces sites permet de se faire une bonne idée de l’île et de ses monuments, gratuitement, sans se déplacer, sans contribuer à la dégradation des lieux. On pourra toujours arguer qu’il manque l’émotion, l’odeur de la mer et les cris des oiseaux. Mais l’Ile de Pâques est un écosystème fragile et elle peut à peine recevoir les flots de touristes qui s’y rendent. En 2009, les Pascuans ont “fermé” l’île pendant deux jour en bloquant l’aéroport, pour manifester leur ras-le-bol.
La virtualisation, si elle est bien faite, peut contribuer à faire connaître les hauts-lieux du patrimoine à un large public, à bas prix et dans l’intérêt de la préservation dudit patrimoine.
A défaut de se rendre sur l’île, il est aussi possible de visiter des expositions
Paris
A défaut du grand moai dans le Jardin des Tuileries, on pourra voir une copie d’une tablette comportant l’écriture rongo-rongo de l’Ile de Pâques.
Exposition “Ecritures silencieuses”
Montréal
A partir du 8 juin, Montréal va accueillir une exposition sur l’Ile de Pâques, au musée d’archéologie et d’histoire de Montréal. Elle réunit 200 objets provenant d’une vingtaine de musées, notamment des pièces avec l’écriture rongo-rongo. Mais pas de moai.
Exposition “Le grand voyage”
Mais si vous voulez tout de même vous rendre sur l’île de Pâques, évitez le 11 juillet 2010. A cette date aura lieu une éclipse solaire totale visible depuis des îles de la Polynésie, dont Rapa Nui. Les hôtels affichent complet …

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Culture Musée virtuel muséographie virtuelle

Remplissez les trous

Dans un compactus du Smithsonian American Art Museum, de nombreuses peintures sont disposées dans l’attente de la visite éventuelle d’étudiants ou d’historiens de l’art. Dans ces compactus, il reste des espaces vides. Le musée invite le public à chercher dans son catalogue en ligne des oeuvres à placer dans ces endroits. C’est Flickr qui sert d’interface à ce projet intitulé “Fill the Gap”. Un album permet de visualiser les panneaux. Les tableaux présents sont annotés et les mesures de la place libre sont aussi données. Le visiteur n’a qu’à se rendre sur le site Internet du musée et chercher une oeuvre qui correspond à l’espace vide et qui s’accorde avec les peintures voisines.

http://www.flickr.com/photos/americanartmuseum/sets/72157613328866883/

http://americanart.si.edu/collections/search/

Ce projet consistitue une sorte de crowdsourcing, un appel à la foule pour remplir une tâche. En même temps, c’est une magnifique invitation à visiter les collections en ligne. Le choix de Flickr est tout à fait judicieux, car cela permet de toucher plus d’utilisateurs que le site du musée.

Fill the Gap

Fill the Gap

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Bibliothèque virtuelle Culture Musée virtuel muséographie virtuelle

Biens communs

L’idée que le patrimoine culturel est un bien commun et que, par conséquent, chacun peut non seulement en jouir, mais aussi l’utiliser dans ses propres productions, fait son petit bonhomme de chemin. Grâce à Flickr, des institutions du monde entier peuvent mettre à disposition des documents numérisés dans le domaine public.

Flickr Commons

Ces documents peuvent être réutilisés sans restrictions. Parmi ces les institutions qui participent à ce programme, on peut mentionner:

  • The Library of Congress
  • Brooklyn Museum
  • Smithsonian Institution
  • Bibliothèque de Toulouse
  • Bibliothèque de la Fondation Calouste Gulbenkian
  • Musée McCord Museum
  • Nationaal Archief (Pays-Bas)
  • New York Public Library
  • Swedish National Heritage Board
  • Llyfrgell Genedlaethol Cymru – The National Library of Wales
  • Getty Research Institute

Non seulement on peut réutiliser ces images, mais on est aussi invité à les commenter et à proposer des mots-clés, donc à les enrichir.

Flickr Commons

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Communautés virtuelles Culture Général Musée virtuel muséographie virtuelle

Tout le monde peut exposer

Hier soir, j’ai été invitée à parler du musée virtuel et de la présence des musées sur Internet par le Groupe interjurassien des Musées GIM, qui regroupe essentiellement de petites institutions muséales, dont certaines sont privées. C’était l’occasion d’explorer la frontière entre collections privées et musées, entre amateurs passionnés et conservateurs professionnels. J’ai donc essayé de défendre l’idée que le savoir muséographique était partagé assez largement dans la population. Pour reprendre le slogan d’un film d’animation célèbre mettrant en scène un petit rat qui devient un grand chef de cuisine, j’ai commencé par affirmer que “tout le monde peut exposer”.

Au départ du phénomène du musée se trouve la muséalité, une attitude humaine profonde qui sélectionne des objets et leur attribue un sens. Ces objets perdent alors leur valeur d’usage pour acquérir une essence différente. Ce phénomène est analogue à celui de la sacralisation dans le domaine des religions: un objet devient sacré et ne retourne jamais au monde profane. L’esprit de collection est courant chez les enfants. Ces derniers rassemblent quelques objets qui ont un sens particuliers pour eux, mais sans suivre forcément une systématique. Ils les mettent dans un contenant, un carton de chaussure ou une boîte en fer blanc. Souvent cette collection d’objet est la seule qu’ils feront de leur vie. Dans le film “Le fabuleux destin d’Amélie Poulain”, cette dernière découvre dans son appartement une boîte en fer blanc avec une collection d’enfant. Elle en recherche le propriétaire, devenu adulte. Le fait de retrouver ces objets collectés pendant son enfance va provoquer chez lui une intense émotion.

Amélie Poulain

Le fabuleux destin d’Amélie Poulain, Jean-Pierre Jeunet, 2001

A l’âge adulte, certains gardent le goût de la collection qui peut aller jusqu’à la passion, voire l’obsession. Tout peut être objet de collection. Beaucoup de collectionneurs apprécient des objets qui constitue des séries: des timbres, des monnaies, des bagues de cigare, des cartes postales, … D’autres types de collection nécessitent des connaissances scientifiques comme les fossiles, les minéraux. Pour collectionner des oeuvres d’art ou des livres anciens, il faut alors une fine connaissance des marchés. Le développement d’une collection s’accompagne toujours d’une érudition propre à l’objet collecté.

Bagues de cigares

La vitolphilie est la collection des bagues de cigare

Toutes ces collections ne restent pas personnelles. On ne le dit jamais assez: de nombreux musées proviennent de collections privées, ouvertes au public ou léguées à l’Etat.

De nombreux objets traversent notre vie et chacun est amené à choisir un jour ou l’autre les objets à conserver et ceux qui sont à jeter. Entre ces deux destinées, il y aussi la mise au grenier ou la mise à la cave. Beaucoup de personnes conservent des objets dans leur grenier en y apportant un certain soin.

Grenier

http://www.flickr.com/photos/ranopamas/198039863

De même, suite à la disparition des générations anciennes, nous héritons d’objets qu’il faut aussi trier. Il faut alors être à même d’identifier chaque chose, d’en évaluer la valeur. Cela prend du temps pour effectuer toutes ces recherches.

Salon victorien

Le petit salon de Mme David Morrice, Montréal, QC, 1899; Musée McCord

Nous sommes aussi habitués à gérer des longues séries: c’est le cas de nos photos. La méthode ancienne était celle des albums, alors qu’aujourd’hui on recourt à des logiciels ou des sites Internet de partage pour gérer ses photos numériques. C’est assez frappant de constater que la gestion des photos est un sujet de conversation assez courant entre les gens. Ils s’échangent leurs trucs et leurs astuces.

Album de photo

Ancien album de photos

La maison elle-même est un lieu d’exposition, notamment dans les pièces où l’on reçoit. Les objets, les bibelots, les souvenirs de vacances ne sont pas disposés au hasard. Il y a sans conteste réflexion, mise en scène, discours.

Salon de l’ethnographie

Exposition au MEN, Le salon de l’ethnographie, 1990

Toutes ces activités ressemblent peu ou prou à celles qui se pratiquent dans les musées. Elles sont largement partagées dans la société. Les musées devraient avoir le courage de laisser le public participer un peu plus à ses activités, non pas comme simple consommateur, mais aussi comme acteur. C’est d’autant plus intéressant que l’Internet participatif ou collaboratif donne des outils permettant aux musée de d’associer leur public à leurs travaux. Certains musées osent franchir le pas, notamment dans le domaine de l’acquisition. Je me souviens que le Musée d’ethnographie de Neuchâtel (MEN) avait demandé à son public d’apporter des objets qui seraient intégrés à la collection du musée. Plusieurs musées collectent aussi des histoires et récits de vie via Internet (ou de manière plus classique). L’indexation sociale (folksonomy) consiste à demander aux internautes d’attribuer ou de proposer des mots-clés sur les photos des objets de la collection. D’autres encore leur propose de créer eux-mêmes des galeries qu’ils peuvent partager avec leurs amis. Le musée 2.0 est déjà là … et les gens ne sont pas dépourvus de compétences pour y participer.

http://www.museesbeju.ch/

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3D Culture Musée virtuel muséographie virtuelle

Réalité augmentée

Réalité augmentée

August 12, 2009 3D, Culture, Musée virtuel, muséographie virtuelle No Comments

On parle depuis un certain temps de réalité augmentée comme un moyen permettant au visiteur d’un site archéologique ou d’un ancien monument de se faire une idée de l’état antérieur des vestiges qu’il a sous les yeux. Certains projets ont déjà été faits pour des sites aussi prestigieux que Pompéi, mais ils sont toujours restés au stade du prototype. Si tout le monde trouve amusant de porter des lunettes ressemblant à une paire de jumelles, le sac à dos contenant l’ordinateur portable pose problème. Son poids sera désagréable pour le visiteur et, de plus, c’est à chaque fois un matériel onéreux qui est mis à disposition.

Il existe pourtant une solution simple et je l’ai vue en oeuvre sur le site romain d’Aquincum, à Budapest. Aquincum était la capitale de la Pannonie romaine, province importante sur la route de l’ambre qui allait de la Baltique à l’Italie. Elle était déjà connue pour ses eaux thermales (encore appréciées aujourd’hui) et on y a découvert un objet très rare, voire unique: un orgue hydraulique. Les ruines d’Aquincum sont visitables et bien mises en valeur, grâce à certaines reconstructions, toujours bien marquées et qui permettent de comprendre par exemple les systèmes de chauffage des Romains. Un musée moderne donne un aperçu de la richesse et du luxe du palais qui s’y trouvait.

La réalité augmentée va montrer aux visiteurs des bâtiments entiers, mais sur le site lui-même. En plusieurs endroits du site, on trouve des appareils ressemblant à des périscopes ou à des jumelles. On a d’abord l’impression qu’on obtiendra des aggrandissements des vestiges. En y collant ses yeux, on découvre en fait des bâtiments dans toute leur élévation, avec un toit, des couleurs et même quelques personnages. L’appareil pivote sur environ 180 degrés et permet donc de découvrir des reconstitutions numériques de plusieurs maisons. Pour ne pas surprendre le regard du visiteur, le système s’adapte aux conditions météorologiques, affichant un ciel bleu les jours de grand soleil et des nuages les jours de pluie.

Kronoscope d’Aquincum

Ce dispositif a été développé par le Computer and Automation Research Institute de l’Académie hongroise des sciences. Il a été installé en 2005. Pour l’instant, deux Kronoscopes sont opérationnels et huit au total sont prévus.

http://www.sztaki.hu/search/projects/project_information/?uid=00010

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3D Culture Musée virtuel muséographie virtuelle

Réalité augmentée

Réalité augmentée

August 12, 2009 3D, Culture, Musée virtuel, muséographie virtuelle No Comments

On parle depuis un certain temps de réalité augmentée comme un moyen permettant au visiteur d’un site archéologique ou d’un ancien monument de se faire une idée de l’état antérieur des vestiges qu’il a sous les yeux. Certains projets ont déjà été faits pour des sites aussi prestigieux que Pompéi, mais ils sont toujours restés au stade du prototype. Si tout le monde trouve amusant de porter des lunettes ressemblant à une paire de jumelles, le sac à dos contenant l’ordinateur portable pose problème. Son poids sera désagréable pour le visiteur et, de plus, c’est à chaque fois un matériel onéreux qui est mis à disposition.

Il existe pourtant une solution simple et je l’ai vue en oeuvre sur le site romain d’Aquincum, à Budapest. Aquincum était la capitale de la Pannonie romaine, province importante sur la route de l’ambre qui allait de la Baltique à l’Italie. Elle était déjà connue pour ses eaux thermales (encore appréciées aujourd’hui) et on y a découvert un objet très rare, voire unique: un orgue hydraulique. Les ruines d’Aquincum sont visitables et bien mises en valeur, grâce à certaines reconstructions, toujours bien marquées et qui permettent de comprendre par exemple les systèmes de chauffage des Romains. Un musée moderne donne un aperçu de la richesse et du luxe du palais qui s’y trouvait.

La réalité augmentée va montrer aux visiteurs des bâtiments entiers, mais sur le site lui-même. En plusieurs endroits du site, on trouve des appareils ressemblant à des périscopes ou à des jumelles. On a d’abord l’impression qu’on obtiendra des aggrandissements des vestiges. En y collant ses yeux, on découvre en fait des bâtiments dans toute leur élévation, avec un toit, des couleurs et même quelques personnages. L’appareil pivote sur environ 180 degrés et permet donc de découvrir des reconstitutions numériques de plusieurs maisons. Pour ne pas surprendre le regard du visiteur, le système s’adapte aux conditions météorologiques, affichant un ciel bleu les jours de grand soleil et des nuages les jours de pluie.

Kronoscope d’Aquincum

Ce dispositif a été développé par le Computer and Automation Research Institute de l’Académie hongroise des sciences. Il a été installé en 2005. Pour l’instant, deux Kronoscopes sont opérationnels et huit au total sont prévus.

http://www.sztaki.hu/search/projects/project_information/?uid=00010

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Applications géographiques Culture Musée virtuel muséographie virtuelle Web sémantique

Différentes facettes

L’expression anglaise “faceted browsing” s’applique à une technique permeetant d’accéder à une collection d’informations selon différents filtres. Chaque objet de la collection se voit attribuer différentes catégories. Ces catégories sont à la base des filtres de recherche.

Un site qui vient de naître et qui présente les différents musées de Suisse romande comme autant de buts de promenade illustre cette technique du faceted browsing: Musardage.

Musardage

Musardage (http://www.musardage.ch)

Ce site contient une liste des expositions actuellement ouvertes en Suisse romande. Mais cette liste peut être lue de différentes manières: comme un tableau, comme une liste illustrée par les miniatures des affiches, comme une frise chronologique ou comme une carte de géographie. De plus, il est possible de filtrer l’ensemble des expositions selon des sujets, le canton ou la localité.

Musardage

Frise chronologique

Musardage

Carte de géographie

Dans la même veine et par le même auteur, on peut aussi parcourir une liste des empereurs romains.

Empereurs romains

Liste des empereurs romains

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Musée virtuel muséographie virtuelle

Le musée en ligne

J’ai participé en tant qu’intervenante dans un atelier lors des premières Assises du Réseau romand Science et Cité. L’atelier pour lequel je devais faire un des exposés introductifs destiné à lancer la discussion et qui avait pour thème « Virtualités: musées virtuels et présence muséale sur Internet » a été précédé d’un exposé lumineux de François Mairesse. Ce grand spécialiste des musées a montré combien le musée d’aujourd’hui pouvait se décliner en diverses combinaisons, à partir d’idées et de contestations issues des années 1960-70. Des musées vitrines aux musées expériences, des musées bricolés aux musées d’architecte qui font oublier le contenu à leurs visiteurs, des musées au discours autoritaire aux musées participatifs, des musées réels aux musées numériques. Ainsi le musée, en tant que forme, est bien virtuel et chaque musée que nous visitons en constitue une actualisation possible.

De mon côté, j’ai soumis l’idée de l’émergence d’une nouvelle muséalité sur Internet, basée sur des pratiques différentes issues de la culture numérique. Une sorte de muséalité parallèle à celle des musées de briques et de ciment. La muséalité est une attitude humaine fondamentale qui vise à choisir des objets de la réalité pour leur attribuer un sens particulier. Cette attitude explique par exemple la tendance à la collection et à la conservation d’objets: bibelots dans une boîte en fer blanc ou souvenirs de familles pieusement conservés dans un grenier. Les sociétés elles-mêmes collectionnent à travers leurs musées, leurs archives et leurs bibliothèques.

Le support a des conséquences importantes sur les pratiques. Si une muséalité émerge dans le monde numérique, elle sera influencée par la nature des technologies numériques. Ces dernières sont basées sur trois piliers:

  • La numérisation
  • L’algorithmique
  • La mise en réseau

La numérisation est un processus réduisant les contenus en langage binaire. Dans la réalité sensible, ces contenus apparaissent comme très différents : image, son, texte. Mais pour un ordinateur, ils ne sont qu’une suite de 0 et de 1.
Un algorithme est un énoncé dans un langage bien défini d’une suite d’opérations permettant de donner la réponse à un problème. On trouve des algorithmes s’appliquant à divers objets : compression de données, tri, cryptographie, graphes, graphisme, génie logiciel, mathématiques, texte. En termes plus clairs, l’algorithmique permet de manipuler les contenus numériques, par exemple en les identifiant (moteur de recherche), en les modifiant (transformations graphiques), en les remixant (logiciels de montage vidéo).
La mise en réseau consiste à tisser des liens entre différentes machines. Les données sont stockées de manière décentralisée, mais accessibles de tout autre point sur le réseau. Il existe aujourd’hui plusieurs réseaux : Internet, les réseaux téléphoniques, les réseaux de télévision. Pratiquement toute les contenus circulant sur ces réseaux sont numériques maintenant.
Ces trois piliers des technologies de l’information affectent profondément les contenus qu’elles traitent. Un des effets les plus importants est la suppression de la notion d’original. Dans le domaine de la photographie numérique, un fichier peut être copié sans aucune perte de qualité. De nombreuses bibliothèques ont conservé des manuscrits d’écrivain et ces documents ont été très étudiés, car ils permettaient de mieux comprendre la démarche de l’auteur. Ces documents n’existent plus (ou de moins en moins) pour les écrivains de notre siècle. Le recours au traitement de texte rend difficile ce type d’études. En revanche, tout l’historique du travail collaboratif de Wikipédia est visible et accessible (et la consultation de ces historiques est parfois hautement intéressante). Il n’y a donc plus d’original dans le monde numérique (ou alors il doit être créé artificiellement, comme on le voit parfois dans Second Life). Le succès se mesure plutôt à la copie, à la diffusion et à la réutilisation des fichiers dans le monde numérique. Les internautes adorent s’envoyer des fichiers numériques ou les republier sur leurs blogs. Ils aiment retravailler les ressources numériques et les remixer.

Il est certainement trop tôt pour dégager les grandes lignes d’une muséalité en ligne, mais on peut déjà esquisser quelques tendances déjà existantes aujourd’hui sur diverses plateformes comme la blogosphère, le Web collaboratif (comme Wikipédia), les sites de partage de fichiers images, audio ou vidéo, les réseaux sociaux, les univers persistants en 3D:

  • La copie qui permet de s’approprier une œuvre, de la diffuser.
  • Le partage a été popularisé par les plateformes peer to peer. C’est devenu une philosophie. Les licences Creative Commons sont très utilisées pour permettre aux autres d’utiliser ses propres créations, avec ou sans citation.
  • La transformation est devenue un élément essentiel de la création, comme on le voit surtout dans le domaine musical. Des morceaux de musique sont mis à disposition des internautes qui peuvent ensuite les remixer. On peut parler de co-création ou de création collective.
  • L’indexation est une pratique plus pointue, mais très présente sur le Web sous la forme d’indexation sociale ou folksonomy. Elle consiste à attribuer des mots-clés à des objets en ligne. Cette pratique peu visible est pourtant essentielle pour l’amélioration de l’accès aux contenus, notamment les contenus non textuels.
  • L’ouverture des systèmes (mash up, API) permet d’utiliser diverses sources pour créer une mise en valeur des contenus. C’est le cas, par exemple, de cartes dynamiques créées avec des systèmes cartographiques ouverts.

Olivier Glassey a présenté aussi un exposé consacré à la folksonomy ou indexation sociale. C’est une pratique très visible dans un site comme Flickr et c’est un des principaux outils permettant d’exploiter les 3 milliards du site. Il a évoqué le projet Steve, dont le but est d’étudier la pratique de l’indexation sociale sur des sites de musées. Il a relevé que 90% des concepts entrés par les internautes ne font pas partie de la documentation du musée.

Dans la discussion qui a suivi, il y a peut-être trois points à relever:

  • l’effet diligence du transfert des musées actuels dans le monde numérique
  • la question de l’original
  • la question de l’autorité et du rôle du musée dans la diffusion du patrimoine

L’effet diligence du transfert des musées actuels dans le monde numérique

Le transfert des musées sur Internet n’est pas aussi évident qu’on le pense. Des investissements sont consentis et l’intérêt du public n’est pas forcément là. Une des raisons pouvant expliquer cette situation est certainement l’effet diligence. Dans l’histoire des techniques, on a remarqué qu’une innovation reste imprégnée de la technologie qu’elle remplace. Ainsi les premiers wagons de chemin de fer ressemblaient-ils à des diligences.

Internet a généré son propre langage et ses propres codes. Une muséographie en ligne doit s’adapter aux habitudes des internautes et non l’inverse. Cela nécessite un travail de réflexion important et de meilleures connaissances des technologies de l’information de la part des professionnels des musées. Dans mes observations des sites de musées, je relève souvent la platitude des applications ludo-éducatives pour les enfants, qui n’offrent aucune comparaison possible avec ce que ces mêmes enfants expérimentent sur leur ordinateur ou leur console de jeux.

L’original

Le rôle premier des musées est la conservation des oeuvres et objets pouvant témoigner des activités humaines, mais aussi de la nature. Ce rôle se complique maintenant par la notion de patrimoine immatériel. S’il n’y a aucun doute sur la nécessité de conserver des oeuvres et des objets, on peut en revanche se demander si seul l’original est digne d’être vu. C’est certainement une conception culturelle qui varie avec l’âge et les cultures, tout comme les modes de jouissance de l’art sont différentes selon les aires culturelles. La copie a été la norme pendant longtemps, comme en témoignent les musées des moulages. Elle revient aujourd’hui à travers des expositions comme celle qui reconstituait la tombe de Toutankhamon. Il est difficile de savoir pourquoi notre époque attache autant d’importance à l’original. Peut-être que l’aisance matérielle dans laquelle nous baignons nous fait-elle désirer des objets authentiques. Peut-être également que la facilité de se déplacer nous fait-elle préférer l’original à la copie. Pourtant quand je me rends dans des musées, j’ai le sentiment que les visiteurs viennent y faire leur copie personnelle, munis d’appareils photographiques et de caméscopes, pour en jouir plus tard, chez eux, en famille ou avec des amis, ou même sur Internet, sur des sites de partage. Le terme « museum »apparaît dans le nuage de mots-clés les plus populaires , ce qui signifie que le musée fait partie des lieux où l’on prend des photos.

Du reste, tous les musées ne travaillent pas avec des pièces uniques originales : c’est essentiellement le cas des musées d’art et d’histoire. Les musées vivants commes les jardins botaniques ou les zoos montrent essentiellement les individus issus de lignées. Les musées d’archéologie et d’anthropologie ont souvent des objets qui appartiennent eux-mêmes à des séries, notamment les objets de la vie quotidienne, mais aussi des objets de rituel. Les objets uniques sont souvent liés à la création artistique. Mais même dans ce domaine, on a souvent affaire à des copies anciennes : c’est le cas de beaucoup de statues grecques qui ont été copiées à l’époque romaine.

La question de l’autorité et du rôle du musée dans la diffusion du patrimoine

La participation et la collaboration sont la norme dans le Web d’aujourd’hui. Les internautes peuvent aussi bien apporter des contenus nouveaux que commenter ceux qui existent. Leurs traces sont également souvent utilisés pour mieux hiérarchiser les contenus (les plus vus ayant souvent la meilleure place). Internet offre donc un grand contraste avec la manière dont les musées conçoivent leur rôle de médiateur. Le visiteur est rarement invité à parler (ou seulement dans le cadre d’enquêtes de satisfaction).

Le musée sur Internet peut-il être 2.0, c’est-à-dire participatif? La réponse à cette question demande quelques nuances, étant donné que, dans bien des cas, il n’est pas possible d’éliminer le rôle des personnes compétentes dans la médiation. Que peut-on demander aux visiteurs des sites?

– donner leur vision de la matière concernée comme alternative à la vision interne aux musées. On a vu que dans les expériences d’indexation sociale, 90% des termes saisis par les internautes ne sont pas dans la documentation des musées. Cette vision extérieure permettra sans doute aux musées d’améliorer l’accès aux objets des collections et leur présentation. Si le terme « hydrie » ne dit plus rien au public d’aujourd’hui, autant employer celui de carafe (puis préciser dans une notice).

– brasser les collections et faire de nouveaux choix. Le choix des oeuvres, des objets, des sujets d’intérêt est soumis à une certaine inertie. Laisser le public accéder à l’ensemble des collections peut permettre de faire remonter quelques oeuvres à la surface. Ce phénomène a été observé sur Amazon: les commentaires des utilisateurs mentionnant des ouvrages plus anciens sur le même sujet que le livre recherché ont relancé la vente de ces ouvrages.

– laisser le public poser les questions et organiser les réponses grâce à un réseau de personnes compétentes.Le site TSR Découvertes est une excellente illustration de cette méthode (http://www.tsrdecouverte.ch/).

– ouvrir à un plus grand nombre de personnes la possibilité de devenir curateur ou commissaire d’exposition. Beaucoup de personnes rêvent de travailler dans un musée et en ont les compétences. Les technologies de l’information permettent de créer un musée virtuel en ligne à peu de frais.

On le voit bien, le musée 2.0 n’est pas forcément aussi radical qu’on l’imagine. Il instaure simplement une meilleure interaction entre les visiteurs et les musées.

Pour terminer, il faut peut-être noter que dans le monde des bibliothèques, la transition vers les technologies de l’information se fait sans accroc. On peut accéder aussi bien aux références des ouvrages qu’à une partie des ouvrages eux-mêmes. Et personne ne doute du bénéfice que cela peut apporter. Pour s’en donner une idée, il faut aller consulter la bibliothèques de manuscrits e-codices:

http://www.e-codices.unifr.ch/fr

Site des Assises du Réseau romand Science et Cité : http://www.rezoscience.ch/rp/sc/assises.html