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Bouquiner

Commander un livre sur Internet est devenu un acte d’une grande banalité. Pourtant chacun d’entre nous a encore des amis qui résistent encore et toujours et persistent à se rendre chez le libraire du coin (pour autant qu’il existe encore), afin de choisir leurs lectures. Et l’excuse qu’ils invoquent est toujours la même : sur Internet, on ne peut pas feuilleter un livre avant de l’acheter.

Pas si sûr ! L’éditeur Harper and Collins vient de lancer son offre «Browse inside». Certains ouvrages proposés sur le site peuvent être parcourus, page après page, grâce à des boutons «en avant», «en arrière», «au début», «à la fin». Contrairement à ce que les produits informatiques offrent habituellement, il est impossible de « scroller » ou d’effectuer une recherche dans le texte. Bel exemple d’imitation, dans le monde numérique en réseau, d’un acte de la vie réelle. On retrouve bien là l’effet diligence : une avancée technologique fonctionne encore dans les cadres de l’ancienne technique. Ici la division en pages, liée à l’impression, est encore opérante.

http://www.harpercollins.com/

Il existe néanmoins un site qui vous permet de feuilleter des livres tout en profitant pleinement des potentialités d’Internet et de l’informatique : Google Book. Autrefois connu sous le nom de Google Print, Google Book permet tout d’abord d’effectuer des recherches dans une immense bibliothèque virtuelle dont la principale caractéristique est de ne pas contenir que des livres dans le domaine publique (ce qui a valu quelques problèmes à Google, lors du lancement de son application). Une fois la requête faite, le système fournit toute une liste de livres, avec l’image de la couverture, qui contiennent l’objet de la recherche. Si on choisit un livre, il est possible d’accéder directement aux pages où se trouve le terme souhaité. Le système autorise aussi la recherche d’ouvrages selon le titre, l’auteur, etc… Il n’est pas toujours possible de parcourir un livre dans son ensemble. Cela est probablement lié aux droits d’auteur et de copie. Il existe trois modes de lecture :

– Lecture dans la totalité de l’ouvrage, permettant de voir chaque page
– Lecture partielle de l’ouvrage
– Extraits tirés de pages : dans ce cas, on ne voit qu’un bout de page qui semble déchiré

L’intérêt principal de Google Book, c’est de partir de mots-clés pour accéder à l’objet livre. Mais en fin de compte, on a toujours affaire à des livres.

http://books.google.fr/

A noter que la version américaine d’Amazon offre la possibilité de feuilleter aussi un livre, de manière partielle. On trouve à côté du livre concerné par cette propriété le bouton « Look inside ».

http://www.amazon.com/

On peut tout à fait sortir du livre pour n’avoir plus que des textes. La Bibliothèque nationale française a numérisé des fonds importants qu’elle offre en format texte sur son serveur Gallica*. Il est possible d’accéder à ces œuvres en recherchant un mot-clé, un sujet, un auteur. Mais là, plus de pages : la pagination n’apparaît que comme une référence. Le texte apparaît complètement détaché de son support papier. Il existe autre bibliothèque numérique exclusivement en fichiers texte : le projet Gutenberg qui offre des ouvrages dans de nombreuses langues. Bien entendu, ces deux initiatives ne contiennent que des textes dans le domaine publique.

http://gallica.bnf.fr/

http://www.gutenberg.org/

Toujours dans le même esprit, l’ensemble de la littérature grecque** a été numérisée. Il s’agit d’un projet de l’Université de Californie, appelé Thesaurus Linguae Graecae, qui date des années 70. Ce corpus était, dès 1985, disponible sous la forme d’un CD-ROM. Divers logiciels permettaient de l’exploiter. Il est actuellement sur Internet. Une requête dans l’ensemble du corpus, avec un mot, plusieurs mots à trouver dans un espace de quelques lignes, permet d’obtenir la liste de tous les auteurs et titres comportant l’objet de la recherche, extraits compris. Ainsi cet outil dispense l’helléniste ou l’historien de l’Antiquité de faire des recherches fastidieuses, en utilisant les index des différentes œuvres. La littérature grecque a été virtualisée et est exploitable en quelques clics de souris.

http://www.tlg.uci.edu/

Etonnement les projets les plus « virtuels » sont les plus anciens et ceux qui sont marqués par l’effet diligence sont les plus récents. Gageons que les logiques commerciales y sont pour quelque chose.

NB : dans cette note, nous ne parlons que de bouquiner, au sens d’accéder au contenu des livres pour savoir lesquels seront à lire.

* parallèlement Gallica offre de très nombreux documents en format PDF, issus d’un processus de scannage sans recours à la reconnaissance de caractères. Ces PDF contiennent en fait des images et sont très lourds à télécharger.
** la version actuelle en ligne contient 3700 auteurs ou 12’000 œuvres, ce qui représente 91 millions de mots !