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Une visite de l’île de Pâques

Le vent a commencé à tourner pour les prestigieuses collections amassées par les grands musées occidentaux. Certains pays réclament avec insistance des pièces particulièrement relevantes pour leur passé ou leur culture. La Grèce avait ouvert les feux en demandant le retour des marbres du Parthénon (cette requête date déjà de l’époque où Melina Mercouri était ministre de la culture). L’Egypte veut récupérer le buste de Néfertiti. La Chine essaye de bloquer la vente de certains objets dans des salles d’enchère. Récemment 17 pays se sont réunis dans le but de réclamer le retour de leurs antiquités, sous l’égide de l’Egypte (et de son dynamique responsable du Conseil suprême Antiquités, Zahi Hawass).
Article AFP
Site de Zahi Hawass
Il existe une convention de l’UNESCO dont le but est de lutter contre l’importation, l’exportation et le transfert illicite des biens culturels. Cependant cela ne concerne que les acquisitions faites après 1970. Il n’existe donc aucune base légale pour réclamer des objets qui sont entrés dans les musées avant cette date, comme les frises du Parthénon ou le buste de Néfertiti. Cela n’empêche pas ces pays de réclamer des objets arrivés dans les musées occidentaux avant cette date.
Convention UNIDROIT de l’UNESCO
Les divers peuples du monde sont de plus en plus déterminés à conserver eux-mêmes leur patrimoine, plutôt que de le laisser partir vers l’Occident. Il y a quelques semaines, les habitants de l’île de Pâques ont refusé de prêter un de leurs moai qui devait être exposé à Paris, dans le Jardin des Tuileries.
Article Cyberpresse
Ceci nous ramène à la question du musée virtuel. Un objet du monde réel ne peut se trouver qu’à un seul endroit. Et cet endroit devient de plus en plus discuté. Il faut encore considérer que certains sites sont difficilement accessibles pour des raisons d’éloignement (c’est le cas de l’Ile de Pâques) ou de conservation (Lascaux ou certaines tombes égyptiennes). Dès lors, comment concilier l’intérêt du public pour le patrimoine culturel avec la préservation de ce patrimoine ou les difficultés d’accès. Les technologies de l’information sont peut-être une des clés de cette question. J’ai donc cherché comment il est possible de visiter l’Ile de Pâques et d’admirer ses fameux moai tout en restant chez soi.
Il existe de nombreux sites Internet consacrés à l’Ile de Pâques et à ses mystères. Je me suis intéressée à des représentations en 3 dimensions. Première déception, il n’existe pas (à ma connaissance) de sim reproduisant une partie ou l’ensemble de l’Ile de Pâques dans Second Life. Néanmoins, j’ai pu acheté un moai pour 200 L$. Idéal pour orner une plage, en compagnie de quelques palmiers.
Moai dans Second Life
Plus intéressant est Google Earth. La résolution de l’île est de qualité acceptable, suffisante en tout cas pour apercevoir les ahu, plateformes sur lesquels se dressaient les moai.
Vue aérienne de l’Ile de Pâques
Quelques groupes de moai ont été modélisés en 3 dimensions. Cela permet de se faire une idée de leur localisation dans le paysage. Les statues sont cependant grossières. Fait intéressant, elles tournent le dos à la plage: les moai regardent vers l’intérieur des terres et non vers le large.
Moai dans Google Earth
Pour ceux qui souhaitent voir les statues et leur environnement en détail, ils peuvent se rendre sur le site “360 cities”, spécialisés dans les visions panoramiques en 360 degrés. En fait, cette technologie existe depuis longtemps sur Internet. On la trouve sur de nombreux sites de musées, sous le terme de visite virtuelle. Elle est aussi beaucoup utilisée dans le tourisme, l’hôtellerie et l’immobilier. Le site “360 cities” présentent des vues panoramiques de nombreux sites dans le monde. L’Ile de Pâques est richement représentée: une vingtaine de site peuvent être visités.
Carte 360 cities
http://www.360cities.net/map#lat=-27.11109&lng=-109.34692&zoom=12
Il suffit de choisir un des points pour visualiser le panorama. On peut ensuite faire un tour sur soi-même de 360 degrés et visualiser le paysage, y compris le ciel. On peut aussi accéder à un autre panorama proche dès que l’on voit s’afficher des flèches blanches.
Moai dans 360 cities
La Fundación Telefónica, une fondation chilienne, a produit un site permettant une visite virtuelle de l’Ile de Pâques. Le maire de l’île commence par vous souhaiter la bienvenue. A partir d’une carte, il est possible d’explorer les principaux sites de l’île.
Visite virtuelle de l’Ile de Pâques
Certains sont présentés comme des highlights. On voit sous forme de photographies avec des commentaires.
Visite virtuelle de l’Ile de Pâques
D’autres sites sont présentés sous forme d’animation: on peut découvrir, par exemple, comment étaient sculptés et transportés les moai.
Visite virtuelle de l’Ile de Pâques
Enfin certains endroits sont  montrés en 3 dimensions. La visite est saisissante. Il est possible de se promener autour des moai, dans un paysage avec une excellente résolution (en comparaison avec d’autres univers en 3 dimensions).
Visite virtuelle de l’Ile de Pâques
http://www.fundacion.telefonica.com/arsvirtual/media/visitas/isla_pascua/alta/pascua/index.htm
Chacun de ces sites permet de se faire une bonne idée de l’île et de ses monuments, gratuitement, sans se déplacer, sans contribuer à la dégradation des lieux. On pourra toujours arguer qu’il manque l’émotion, l’odeur de la mer et les cris des oiseaux. Mais l’Ile de Pâques est un écosystème fragile et elle peut à peine recevoir les flots de touristes qui s’y rendent. En 2009, les Pascuans ont “fermé” l’île pendant deux jour en bloquant l’aéroport, pour manifester leur ras-le-bol.
La virtualisation, si elle est bien faite, peut contribuer à faire connaître les hauts-lieux du patrimoine à un large public, à bas prix et dans l’intérêt de la préservation dudit patrimoine.
A défaut de se rendre sur l’île, il est aussi possible de visiter des expositions
Paris
A défaut du grand moai dans le Jardin des Tuileries, on pourra voir une copie d’une tablette comportant l’écriture rongo-rongo de l’Ile de Pâques.
Exposition “Ecritures silencieuses”
Montréal
A partir du 8 juin, Montréal va accueillir une exposition sur l’Ile de Pâques, au musée d’archéologie et d’histoire de Montréal. Elle réunit 200 objets provenant d’une vingtaine de musées, notamment des pièces avec l’écriture rongo-rongo. Mais pas de moai.
Exposition “Le grand voyage”
Mais si vous voulez tout de même vous rendre sur l’île de Pâques, évitez le 11 juillet 2010. A cette date aura lieu une éclipse solaire totale visible depuis des îles de la Polynésie, dont Rapa Nui. Les hôtels affichent complet …

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Communautés virtuelles Hypermonde Second Life Usages

Avatar

Ce que déclare le héros d’Avatar sur son handicap en dit long sur le monde dans lequel il habite: à son époque, réparer une moelle épinière ne représente pas de problème quand on a assez d’argent. Mais lui, un ancien marine, est condamné à rester dans sa chaise roulante. Il se retrouve sur une planète pommée où un gouvernement prête main forte à une compagnie minière peu scrupuleuse, en envoyant une compagnie avec à sa tête un colonel baroudeur, prêt à casser du jaune, du rouge et, dans le cas présent, du bleu.

Rien d’étonnant à ce qu’il préfère ses voyages dans son avatar à la triste réalité qu’il a sous les yeux. A travers son avatar, il peut marcher. Il découvre des paysages fantastiques, entre en contact avec d’autres créatures. Il apprend même à chevaucher des animaux à quatre pattes et à dompter une espèce de ptérodactyle pour voler dans les airs. Mais quand son corps réel se rappelle à lui, il doit quitter ce monde extraordinaire. Il lui faut manger, dormir. On le voit dans le film avaler son repas en quatrième vitesse pour rejoindre son avatar. On l’aperçoit parfois mal rasé, signe de laisser aller.

Cette expérience n’est-elle pas celle de nombreuses personnes qui passent de plus en plus de temps dans les univers virtuels? Elles dorment moins, ce qui n’est pas sans conséquences pour leur santé. Elles mangent vite et mal. Elles n’ont pas forcément moins de relations sociales, mais ces relations sont différentes. On sait que les liens qui se nouent en ligne sont plus fugaces et se défont rapidement. Mais la facilité des mondes virtuels est tentante. On devient un héros tueur d’orques dans World of Warcraft ou bien on se construit une vie de nabab dans Second Life moyennant quelques dollars. On se créé vite des amis dans Facebook et on en change quand ils deviennent ennuyeux. Pourtant le retour sur terre est inévitable … et parfois douloureux.

Mais James Cameron ne se pose pas tant de questions. Il autorise son héros à “télécharger” son esprit dans le corps de son avatar pour rester dans son monde d’élection. Un deus ex machina permettant d’éluder la question posée par d’autres films (comme Matrix) … et d’assurer que le film aurait une suite.

Les mondes numériques peuvent prolonger le souvenir d’une personne auprès de ceux qui l’ont connue, mais certainement pas sa vie. La question de savoir ce que deviennent nos doubles numériques après la mort de notre enveloppe charnelle est actuelle. Facebook a déjà créé un formulaire d’annonce permettant de signaler un décès. Le compte n’est pas désactivé, mais modifié. Il est accessible aux seuls amis confirmés.

http://www.facebook.com/help/contact.php?show_form=deceased

La vie reste la vie et le rêve reste le rêve. On ne peut pas rejoindre le monde des rêves de manière permanente. Qu’on le vive dans sa tête ou qu’on puisse lui donner un semblant d’existence avec des applications informatiques ne change pas grand chose. Il faut rester éveillé, présent dans sa vie. J’ai trouvé un poème de Robert Desnos qui exprimait cette idée avec de beaux mots:

Poser sa tête sur un oreiller
Et sur cet oreiller dormir
Et dormant rêver
À des choses curieuses ou d’avenir,

Rêvant croire à ce qu’on rêve
Et rêvant garder la notion
De la vie qui passe sans trêve
Du soir à l’aube sans rémission.

Ceci est presque normal,
Ceci est presque délicieux
Mais je plains ceux
Qui dorment vite et mal,

Et, mal éveillés, rêvent en marchant.

Ainsi j’ai marché autrefois,
J’ai marché, agi en rêvant,
Prenant les rues pour les allées d’un bois.

Une place pour les rêves
Mais les rêves à leur place.

État de veille, 1936

Il y a cependant un excellent conseil donné dans ce film, que l’on peut suivre si l’on reste tenté par une vie dans les mondes virtuels: la tenue d’un journal. Tenir un journal ou un blog permet de garder une certaine distance par rapport à ce que l’on vit dans ces univers parallèles.

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Second Life The Monastery Project

Un nouveau sim pour le Monastère

Le Monastère est une institution à but culturel qui se trouve dans Second Life. Il présente régulièrement des expositions thématiques ou artistiques. Sis depuis un an et demi sur le sim Alpine Meadow, qui fait partie de la Confederation of Democratic Simulator (CDS), il vient de déménager sur le sim voisin qui vient de naître. Ce sim porte lui aussi le nom de Monastère. Il s’agit en fait d’un sim “allégé”, homestead selon la nomenclature de Linden. Ce type de sim comporte moins de briques de construction (3700 au lieu de 15′000) et a des performances moins grandes (il ne supporte que 20 avatars simultanément). Il est tout à fait idéal pour une institution comme le Monastère, qui connaît un trafic régulier plutôt qu’un afflux lié à un événement. Comme il comprend moins de briques de construction pour une même surface que les sims normaux, il permet d’avoir une densité d’habitation moins élevée. Ainsi il n’y a que 6 parcelles pour résidents, à côté du Monastère. Cela laisse beaucoup de place pour se promener dans le paysage de montagne qui a été conçu pour le sim.

Le Monastère sur son sim

Le Monastère a été déménagé tel quel, à quelques détails prêt. L’orientation du bâtiment a été modifié: il a subi une rotation de 25 degrés. Le mur de façade a aussi été transformé en colonnade, pour le rendre ouvert et inviter les visiteurs à entrer.

Le Monastère sur son sim

Le bâtiment surplombe une gorge profonde dans laquelle s’écoule un torrent.

Le Monastère sur son sim

La cascade constitue l’un des principaux éléments du paysage du sim.

Le sim du Monastère (Monastery) fait lui aussi partie du CDS et sa création est l’aboutissement d’un processus décisionnel démocratique. Le projet a fait l’objet de plusieurs débats. Maintenant le Monastère peut continuer ses activités dans son nouveau cadre.

http://slurl.com/secondlife/Monastery/195/125/99

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3D Hypermonde Musée virtuel Second Life

Cocon virtuel

Imaginez un cocon géant noir dans lequel on peut entrer et s’immerger dans des mondes virtuels divers. Plus besoin d’écran, de clavier, de souris. Tout est intuitif. Une expérience holistique. C’est en tout cas ce que promet le projet Immersive Cocoon (ou i-Cocoon), encore au stade du prototype et directement inspiré du film Minority Report.

Immersive Cocoon

http://www.i-cocoon.com/

http://www.cnn.com/2008/TECH/09/11/immersive.cocoon/index.html

Différents usages sont envisagés: jeux, visites de musées, travail, sport, relaxation auxquels on pourrait ajouter l’enseignement, le shopping et les relations sociales.

Un autre projet propose un casque permettant de s’immerger dans un monde virtuel en ayant les cinq sens en éveil (et non pas seulement la vue et l’ouïe). Dans ce casque, on verra des images, on entendra du son en vidéo, on sentira des odeurs, des goûts et même des sensations comme la chaleur ou l’humidité.

http://digital.warwick.ac.uk/News/towards-real-virtuality.html

Avec un tel casque, il sera possible de visiter un lieu lointain ou une époque passée, en se sentant en parfaite immersion.

Passons sur les désillusions possibles: les odeurs d’une ville du Moyen-Âge ou des couloirs de Versailles ne constitueront certainement pas le meilleur de l’expérience. Ces projets montrent une évolution intéressante dans le domaine de l’interface: l’ordinateur avec le clavier, l’écran et la souris, n’est pas un moyen adéquat pour entrer dans un monde virtuel. D’autres systèmes doivent être développés. Alors qu’on se déplace toujours aussi péniblement dans Second Life avec des touches du clavier, la Playstation 3 permet déjà d’accéder dans un univers persistant appelé Home. L’idée d’un appareil dans lequel on peut entrer semble intéressante, même si on peut se demander une telle machine entrera facilement dans nos appartements exigus. Un casque paraît de ce point de vue plus intéressant, même si imaginer tous les membres d’un même ménage avec des casques sur la tête peut paraître un peu risible.

Si on peut se réjouir de l’évolution des interfaces, il faut peut-être s’interroger sur les contenus accessibles via ces interfaces. Les spectacles deviendront de plus en plus réalistes, mais cela ne signifie pourtant pas qu’ils seront vrais. Les mondes virtuels sont construits au moyen d’algorithmes et de diverses ressources numérisées comme des images, des sons, des vidéos. Cela ne semble pas poser trop de problème pour des jeux, du moment que l’utilisateur sait (ou reste conscient) qu’il joue. En revanche, quand il s’agit d’utiliser ces systèmes pour visiter des périodes du passé, cela pose plus de problèmes. Les images diffusées ne seront toujours que des reconstitutions qui peuvent en tout temps être remises en question par des découvertes ou de nouvelles méthodes. Mais l’impression que ces images font dans une situation d’immersion rend cette critique difficile.

Les futurs visiteurs des mondes virtuels seront peut-être comme les hommes attachés dans le fond de la caverne de Platon, qui contemplent les reflets de la réalité projetés sur le mur de la grotte. Plus ils passeront du temps dans ces mondes artificiels, plus ces derniers feront partie de leur réalité et finiront par se confondre avec elle.

Allégorie de la caverne

Platon nous dit bien que la difficulté surgit quand on détache l’un des ces hommes pour l’exposer à la lumière du jour: l’expérience est douloureuse et l’individu doit s’habituer à cette lumière aveuglante. Comment se fera le passage du monde virtuel vers le monde réel pour ceux qui y passeront beaucoup de temps, par exemple pour le travail, les relations sociales et les loisirs? Que sera leur rapport avec le monde réel, beaucoup plus contraignant?

Toutefois je ne pense pas qu’il faille renoncer à ces univers persistants en 3 dimensions. Ils ont beaucoup d’avantages. Néanmoins il est nécessaire d’apprendre à les utiliser et à s’en servir de manière cohérente. L’idée d’avoir chez soi (ou d’habiter) un cocon qui reconstruit autour de soi le monde et dispense de s’y aventurer réellement fait un peu peur. En revanche d’avoir de tels cocons dans des lieux publics, comme des musées ou des bibliothèques, me semble plus sain.

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Musée virtuel muséographie virtuelle Second Life

La trame du temps

La muséographie classique s’aventure parfois en dehors des musées et occupe certains espaces comme des passages sous-voies ou des halls de supermarché. Ces escapades l’obligent à repenser un peu la manière dont elle présente ses objets. Néanmoins elle reste dans son élément fondamental, à savoir un espace, un lieu. La muséographie virtuelle en ligne doit, elle, complètement réinventer la présentation de ses objets. Elle n’a pas forcément de lieu où s’exprimer et si espace il y a, c’est celui de l’écran d’un ordinateur ou alors un espace virtuel. La question n’est pas tant d’attirer les visiteurs dans un lieu que de susciter une curiosité qui les fera passer un peu de temps devant leur écran. Dans la muséographie virtuelle en ligne, le temps est un critère décisif. Le temps de l’Internet est devenu une suite de moments plutôt qu’un temps linéaire ou un temps cyclique. Néanmoins chacun de ces moments peut être caractérisé, soit par rapport au calendrier classique (saisons, fêtes, etc.), soit par rapport aux périodes de l’existence (enfance, parentalité, retraite, etc.). L’intérêt du visiteur potentiel peut donc être mobilisé par le biais de ces éléments temporels. De plus, comme ce visiteur n’a pas à se déplacer, il peut consacrer une série de moments à un projet muséal. Ainsi le calendrier, sous toutes ses formes, peut structurer une exposition, au même titre que l’espace dans un musée classique.

Depuis quelques années, nous nous sommes intéressés au calendrier de l’avent comme une forme intéressante de muséographie en ligne. Tout d’abord, il s’agit d’une tradition bien ancrée dans la culture occidentale. Ensuite, le calendrier de l’avent s’appuie sur l’impatience dans l’attente d’un moment fort. Une série de petites surprises est censée atténuer cette impatience pour le moment où l’on recevra une grande surprise. La surprise elle-même suscite la curiosité: que découvrira-t-on derrière une porte? Que verra-t-on demain? Nous avons mené plusieurs expériences avec des calendriers de l’avent. La première consistait à utiliser un blog et à publier chaque jour un texte littéraire en rapport avec Noël muni d’une page de calendrier. La seconde expérience est celle du Calendrier de l’AVANT qui joue sur l’homonymie avant-avent. Pour rappel, le terme avent signifie l’attente. Le Calendrier de l’AVANT, qui en est à sa deuxième année, présente des aspects du passé lointain de l’homme. Chaque jour, il met en avant une découverte, une conquête (1ère année) de l’homme ou bien s’intéresse aux aspects plus immatériels de son histoire, comme l’amour, le deuil, le plaisir (2ème année). Derrière chaque porte se cache un montage graphique muni d’un titre et d’un petit texte.

Exploration

http://www.be-virtual.ch/adventcalendar/

Les échos que nous avons eus de cette expérience est que les gens trouvent agréables d’acquérir (ou de rafraîchir) des connaissances sur le passé de l’homme sous cette forme, légère et amusante.

Nous avons aussi installé un autre calendrier de l’Avent dans Second Life. Le projet s’intitule « 24 Masters » et consiste à offrir 24 oeuvres picturales dont le thème est la Nativité: adoration des Mages, adoration des bergers. Les oeuvres proviennent du Moyen-Âge, de la Renaissance et de la période baroque. A côté de tableaux, on trouve aussi des enluminures de manuscrit et des dessins ainsi qu’un poème. Chaque oeuvre est accompagnée d’une brève notice. Visiblement quelques avatars cherchent à obtenir l’ensemble des oeuvres présentées. A la fin, les contenus de l’ensemble des portes seront disponibles.

Calendrier de l’Avent

SLURL: http://slurl.com/secondlife/Colonia%20Nova/56/163/38

En fait, tout ce qui est temporel se prête à un traitement muséographique en ligne. Les internautes sont prêts à visiter plusieurs fois un même endroit si une trame temporelle s’y déroule. Ils peuvent aussi être alertés par des fils de syndication et venir découvrir une nouveauté. La muséographie en ligne peut s’appuyer sur le rythme infernal de l’actualité sur Internet et utiliser les mêmes outils.

Un autre exemple de trame temporelle est la frise chronologique. On l’a déjà évoquée dans ce blog. Les sites muséaux l’ont déjà adoptée. La frise chronologique permet de présenter des oeuvres d’art ou des objets archéologiques sur une ligne qui correspond au temps. Mais on pourrait songer à d’autres formes comme le feuilleton. Du reste, le journal Le Temps lance ces jours un feuilleton consacré à un personnage méconnu de la grande histoire, Reynold Thiel:

http://www.letemps.ch/dossiers/2008thiel/

Le journal se réclame du genre du feuilleton, très en vogue dans la presse du 19ème siècle. Il faut avouer qu’Internet se prête particulièrement à un tel traitement.

Il est évident que la muséographie virtuelle en ligne induit un certain nombre de changements dans la présentation de ses objets. Le transfert d’une présentation dans l’espace à une trame temporelle en est un. Tout comme l’espace, le temps est porteur de dramatisation. Le théâtre classique ne réclamait-il pas cette unité de lieu et de temps, montrant par là une certaine équivalence de ces deux dimensions? Seul le théâtre est capable de les associer pleinement. Un musée réel est surtout un espace, mais la visite s’y déroule dans un laps de temps réduit. Le site Internet a l’espace étriqué de l’écran à sa disposition, mais il peut se développer dans le temps et même (avec un peu de programmation) jouer avec lui.

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Culture Musée virtuel muséographie virtuelle Second Life The Monastery Project

Second Mirror

Second Life donne à ses résidents une impression saisissante de réalisme. Alors que tout pourrait être fantaisie, les maisons et les infrastructures ressemblent beaucoup à ce qu’on voit dans le monde réel. On peut y acquérir l’équivalent en pixels de meubles, de vêtements, de véhicules. A la longue, on a l’impression qu’évoluer dans ce deuxième monde est assez semblable à vivre sa première vie. Pourtant certains signes ne devraient pas tromper. Que se passe-t-il par exemple quand on passe dans un miroir dans Second Life? Une chose extraordinaire qui ne devrait frapper notre imagination: le miroir ne réfléchit pas notre image. Il en va de même quand on se penche sur une surface d’eau ou bien quand on passe devant une surface vitrée.

Ce simple fait doit nous rappeler, si besoin est, que les mondes virtuels sont le fruits d’algorithmes programmés. Ils ont les caractéristiques du monde réel qu’on veut bien ou qu’on peut leur donner. Dans Second Life, la matière est une image de la matière réelle: elle n’en possède donc pas forcément les propriétés. Souvent les designer jouent sur des textures qui donnent une apparence identique. Mais des propriétés comme la réflexion des images ou les ombres devraient faire l’objet de développement dans le système lui-même. C’est du reste envisageable et on peut sûrement trouver des exemples de mondes virtuels avec des ombres ou des surfaces réfléchissantes. Cela peut par exemple être le cas dans le domaine des jeux sur ordinateur ou console, où le monde est plus limité et moins générique. Pour revenir à nos miroirs de Second Life, des designers ont tenté de réaliser des objets ayant la même fonctionnalité avec plus ou moins de bonheur.

Un bref retour sur une journée ordinaire montrera que nous sommes constamment soumis, dans le monde réel, à des surfaces réfléchissantes: à la maison, dans les restaurants, chez le coiffeur, etc… L’homme et son reflet ont une histoire complexe, remontant à l’époque où un humain s’est reconnu ou a reconnu l’un de ses semblables dans une mare. Divers contes et mythes montrent les relations complexes que l’homme entretient avec son miroir. La plus connue est probablement celle de Narcisse.

L’homme a essayé de construire des miroirs, tout d’abord en polissant la pierre, puis le métal. Puis le verre est arrivé. Si les miroirs de Second Life ne restituent pas notre image, Second Life constitue peut-être lui-même un reflet de notre propre. Le thème du miroir fait donc l’objet d’une exposition dans Second Life, plus exactement dans le Monastère du sim d’Alpine Meadow, sous le titre Second Mirror. L’exposition dans l’espace virtuel est doublée par un site Internet reprenant en partie sa scénographie.

Second Mirror - Affiche

SLURL: http://slurl.com/secondlife/Alpine%20Meadow/198/106/97

Site Internet: http://be-virtual.ch/mirrors/

Dans cette exposition, on peut s’immiscer dans trois fables ayant pour thème central un miroir ou une réflexion:

  • Narcisse qui tombe amoureux de sa propre image qu’il regarde sur une surface d’eau
  • La Méduse qui se pétrifie elle-même en croisant son regard dans son reflet sur le bouclier de Perseus
  • Blanche-Neige dont la belle-mère avait un miroir omniscient

Une saynète supplémentaire montre aussi le miroir brisé comme symbole de malheur: si un visiteur le casse par inadvertance, le miroir fait apparaître le message « 7 ans de malheur ».

Cette exposition permet aussi de se confronter à des miroirs semblables à ceux que nous confrontons dans notre quotidien, mais qui ne rendent aucune image. Le visiteur pourra aussi découvrir l’ingéniosité de certains développeurs qui ont tenté de tirer partie du système pour créer de pseudo-miroirs. Enfin, il découvrira les activités de résidents de Second Life qui se prennent en photos avec des surfaces supposées réfléchissantes, puis retravaillent ces images pour y ajouter un reflet. Deux oeuvres sont exposés, mais de nombreuses autres sont visibles sur Flickr:

http://www.flickr.com/groups/slmirrors/

Avatar and mirror

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3D Communautés virtuelles Hypermonde réseaux sociaux Second Life Tendances

Voici venu le temps de l’hypermonde

Hyper

Après l’hypertexte, né dans les années 70, après l’hyperinformation constituée par l’enchevêtrement des connaissances à la fois dispersées et reliées sur Internet, voici venu le temps de l’hypermonde. Non content de numériser l’ensemble des contenus, les humains projettent leur ego numérique dans des mondes virtuels persistants et des réseaux sociaux. Par là, ils deviennent l’un des constituants d’une entité qui s’étale sur plusieurs niveaux : le substrat physique (tant qu’il lui faudra de l’électricité et des câbles), les connections logiques (protocoles, logiciels) et ce qu’on pourrait appeler – pour faire court – intelligence collective (ou conscience, si l’on ose). La Matrix est-elle en train d’émerger devant nous ? Plutôt que d’essayer de répondre à cette question, il faut s’interroger sur le devenir de l’individu dans l’hypermonde.
Pour mémoire, l’individu est une création récente de notre culture occidentale (de loin pas un phénomène général dans l’histoire de l’humanité). Il a commencé à émerger à la Renaissance et son règne culmine aujourd’hui au point que de nombreux réseaux sociaux traditionnels, en premier lieu la famille, sont atomisés par lui.

La socialisation dans l’hypermonde

D’un côté, Internet, à travers ses réseaux sociaux et ses mondes virtuels, permet de nouvelles formes de socialisation. Chacun peut avoir ses amis en ligne, des amis qu’il n’a peut-être jamais rencontré dans le monde réel, intégrer divers tribus dans les mondes persistants ou dans les communautés de jeu. On pourrait s’en réjouir et considérer que le Web joue le rôle de ciment social que l’état, la société, la famille ont perdu. Mais c’est ignorer la nature des relations nouées dans le monde virtuel que le philosophe Zygmunt Baumann qualifie de liquide. Elles sont soumises au zapping, comme l’information sur les chaînes de télévision ou sur des sites Internet : on ne s’attarde pas, on n’approfondit rien et, une fois que l’intérêt perdu, on passe à une autre relation.

La fragmentation de l’individu

D’un autre côté, Internet incite à poursuivre le processus d’atomisation que l’individualisme a entamé. Non content d’isoler l’individu, souvent en le maintenant des heures durant derrière son écran, le réseau lui permet encore de se fragmenter et de donner à ses différentes facettes une individualité propre. Dès lors, l’individu peut se scinder en autant de profils et d’avatars qu’il a de facettes. On peut se restreindre ici à la question du genre. La psychologie considère que chacun, quel que soit son sexe, a un part de l’autre sexe en lui. Un homme peut donc explorer sa féminité en créant un avatar féminin dans Second Life, à côté de son avatar masculin. Le phénomène n’est pas rare, puisque l’on considère qu’environ 20% des avatars femmes sont en fait des hommes. Certains créent même des avatars des deux sexes pour explorer les relations qu’ils ont entre eux. Voilà qui rappelle l’étrange roman de Balzac, Seraphita. Si les résidents de Second Life répugnent à parler de leurs multiples avatars, quelqu’uns n’hésitent pas à les présenter aux yeux des autres, exprimant par là la complexité de leur être.


Sleeping Hermaphrodite 2, première mise en ligne par bblfish.

Dans l’hypermonde, chacun de ces avatars ou chacun de ces profils peut acquérir une certaine autonomie : il a des amis ou des expériences inconnus des autres facettes. Le terme avatar est bien choisi du reste, puisqu’il désigne, dans la religion hindouiste, les différentes incarnations d’une divinité. La plupart des avatars sont des incarnations partielles, ne reprenant que certains aspects de la divinité.

Projection

Avant l’arrivée des mondes virtuels, l’individu avait déjà des possibilités de se projeter dans d’autres univers, à travers les récits légendaires, la littérature, le cinéma ou le jeu. Cependant la confrontation avec les créatures de ces mondes ne se faisait qu’à travers un soliloque interne, même si d’aucuns avaient imaginé qu’on puisse entrer dans un livre ou dans un film (L’histoire sans fin, La rose pourpre du Caire). Maintenant, à travers ses projections dans l’hypermonde, le profil partiel d’une personne rencontre d’autres individus ou d’autres fragments d’individus et il interagit avec eux.

Jeu et avatar

Il est difficile de savoir comment l’individu réagit quand il est confronté à la réalité de la personne derrière l’avatar et le profil. Pour revenir à Second Life, il n’est pas rare de recueillir les confidences désabusées d’avatars masculins ayant passé une soirée avec un avatar qui s’est avéré être un homme. Dans la tradition théâtrale, la situation est pourtant commune. Par manque de monde ou suite à des interdits sociaux, des acteurs de même sexe sont appelés à interagir, l’un dans son genre originel, l’autre travesti. Mais les acteurs jouent et ont recours à des conventions qui ne masquent pas le sexe réel de la personne travestie. Dans l’hypermonde, il en va tout autrement et cela pour deux raisons principales : l’identité informatique n’est pas un travestissement. Aucune trace du sexe d’origine ne peut être décelée (à l’exception de la voix). De plus, l’investissement émotionnel est différent : contrairement aux acteurs qui ont travaillé leur personnage et leur rôle, les individus se rendent dans l’hypermonde plutôt désarmés. En résumé, l’hypermonde ne reproduit pas un univers de convention où les repères sont relativement clairs. Il est plutôt à l’image des frontières entre les genres qui apparaissent de plus en plus floues de nos jours : chacun doit régler lui-même la question de son identité. Cette dernière peut être exploré dans l’hypermonde. Il est cependant pas certains que l’individu y trouve les réponses qu’il cherche. Il risque même d’ouvrir d’autres boîtes de Pandore…

Entre virtualisation et actualisation

L’homme devra apprendre à gérer ses projections dans l’hypermonde et établir des règles de conduite. Il est temps de s’y mettre. On a inventé la voiture avant le code de la route. Il est intéressant de constater que le WWW a généré très rapidement une éthique : la fameuse Nétiquette. Mais le phénomène ne semble pas se répéter dans le cas de l’hypermonde. Il est probable que les questions que ce dernier pose sont d’une extrême complexité.
Le défi consiste maintenant à appréhender l’hypermonde, à l’étudier, notamment sous l’aspect de ses conséquences pour la société et l’individu (et pas seulement pour l’économie). Les sciences sociales dans leur ensemble (du droit à la psychologie, en passant par l’anthropologie) devraient créer des programmes d’envergure. L’un des principaux enjeux de ces réflexions est de définit la nature du virtuel et ses implications pour l’être humain. Pierre Lévy a défini le virtuel comme le potentiel, se réclamant en fait d’une définition datant du Moyen-Âge et provenant de la philosophie scolastique. Dans une graine d’arbre, il y a potentiellement un arbre. Mais cet arbre doit ensuite s’actualiser : il y a en lui une infinité d’actualisations possibles, mais une seule existera dans le monde réel. Ainsi ce qui est virtuel, n’est pas irréel, c’est-à-dire faux, mensonger, inexistant, alors qu’on comprend souvent cela sous ce terme. Ce qui est virtuel s’ouvre sur un grand nombre de possibles. Un réseau social comme Facebook contient potentiellement une infinité de relations possibles entre individus, mais seules certaines se réaliseront de manière concrète. Le passage au concret est l’actualisation.
L’hypermonde, contenant à la fois Internet, les réseaux sociaux, les mondes virtuels en réseaux (jeux ou non), constitue une gigantesque virtualisation du monde. Alors que les réseaux sociaux classiques se construisent grâce aux études, à la profession et aux hobbies, l’hypermonde permet de rencontrer des individus de manière complètement renouvelée, par le simple jeu des mots-clés.
Une fois les relations établies, la question de leur actualisation se pose de manière aiguë. Certaines se prolongent dans le monde réel, par des rencontres. D’autres au contraire continuent leur existence dans le monde virtuel. Cela ne signifie pas pour autant qu’elles n’ont rien de tangible. Des avatars peuvent construire ensemble des projets dans le monde virtuel : créer une maison, ouvrir une boutique , etc… Ces créations et collaborations supposent le plus souvent un échange monétaire, ce qui les fait sortir du purement virtuel. Il faut aussi prendre en compte le fait que l’hypermonde devient aussi un outil de plus en plus utilisé par des réseaux pré-existants pour faciliter les échanges et se développer. On assiste à des cycles complexes de virtualisation et d’actualisation.
Le danger de cette situation est peut-être, pour l’individu, de penser que le monde virtuel est un espace de moindre contrainte où tout ou presque est permis ou alors un lieu où il est possible de vivre ce que la vie réelle nous refuse. En clair, l’hypermonde favoriserait le bovarysme. Mais plutôt que de fuir dans le rêve, l’individu peut se construire une deuxième vie en lui donnant l’apparence de son rêve. On sait aussi que l’hypermonde peut créer des addictions. Tous les individus ne sont pas touchés par ces problèmes : la plupart finissent par gérer leurs multiples existences. Reste qu’il est bon d’ être conscient des différences qui existent entre notre monde réel et ses multiples virtualisations. Les mondes virtuels par exemple sont constitués de pixels et reproduisent imparfaitement les caractéristiques de la matière : poids, résistance, pouvoir réfléchissant. Pour s’en convaincre, il suffit de passer devant un miroir dans Second Life.

L’hypermonde demain

Cet hypermonde aura certainement sur nos existences des répercussions qu’on a de la peine à imaginer aujourd’hui. Le WWW a déjà passablement bousculé le monde, notamment dans les domaines de la musique, de la presse, du cinéma, de l’organisation des voyages. Les réseaux sociaux sont en train de révolutions les relations humaines. Les mondes virtuels en réseau apportent un élément supplémentaire : celui d’espaces atteignables grâce à des machines numériques, en prenant la forme d’un avatar. Déjà aujourd’hui, Second Life offre de nombreuses possibilités de vivre des activités à distance : danser, visiter un musée, participer à une discussion, jouer, suivre des cours, etc…. Mais Second Life n’offre que de médiocres possibilités de diriger l’avatar au moyen du clavier (un bel exemple d’effet diligence). Un jour, on pourra peut-être diriger son avatar avec un système comme la console de jeu Wii. A ce moment-là, rien ne s’opposera à vivre pleinement (et pas seulement avec le bout des doigts et les yeux) une soirée dans l’hypermonde. On pourra aller danser, jouer une partie de tennis avec un partenaire américain, boire un café et discuter avec un groupe d’amis, faire du shopping et essayer des vêtements sur son avatar.
Le futur de cet hypermonde tient cependant à quelques conditions : robustesse du réseau, haut débit accessible au plus grand nombre, meilleure protection de la vie privée et des données, modèle économique viable et adéquation avec le développement durable en sont les principales. A son tour, il augmentera la fracture numérique, entre ceux qui seront capables d’y entrer parce qu’ils en ont les moyens, les compétences et surtout la compréhension, et ceux qui resteront en dehors. A son tour, il fera vaciller certaines institutions ou branches économiques, en premier lieu le monde des loisirs.

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Visiter la Cité interdite bis

Nous en avions parlé dans ce blog il y a plus de deux ans: la Chine projetait d’ouvrir une version en 3D de la Cité impériale, en collaboration avec IBM. C’est chose faite maintenant. Il est désormais possible de visiter le palais des empereurs chinois sous la forme d’un avatar, de déambuler dans les cours, les salles et les jardins. Pour l’instant, un tiers environ de l’ensemble est accessible. Pour visiter la Cité interdite, il faut télécharger une application disponible en version Windows, Mac et Linux. Pour ce qui est des langues, on a le chinois et l’anglais à choix. On peut entrer soit comme hôte, soit en créant un compte gratuit.

Vue de la Cité interdite

Le système ne déconcertera pas un utilisateur de Second Life, car certaines fonctionnalités sont semblables, notamment le déplacement de l’avatar avecles touches du clavier (en haut, en bas, à gauche, à droite). Les fonctions de caméra sont aussi très semblables. Il est aussi possible de prendre des images, les ranger dans son livre d’images ou les envoyerà un ami. Une carte est disponible, à partir de laquelle on peut se télécharger vers des lieux intéressants. La carte retient aussi le parcours du visiteur, ce qui est très utile dans ce labyrinthe.

Interface utilisateur

La réalisation est de qualité. Les différents éléments architecturaux sont présentés avec un grand détail. Des objets en 3 dimensions comme des statues, des vases, des braseros sont très réalistes aussi. Petit détail intéressant et qui diffère de l’univers de Second Life: l’avatar est suivi par son ombre.

Cette version 3D de la Cité interdite est conçue comme un musée. Elle a donc un certain nombre de fonctionnalités muséales. De nombreux lieux font l’objets d’une description détaillée, avec des images de la version réelle. Ces descriptions peuvent être appelées au moyen d’un clic. Mais dans cette Cité interdite, on a aussi des guides qui ont tout à fait l’apparence d’avatar et qui communiquent avec le visiteur au moyen du chat. Il suffit de s’approcher de l’un de ces guides ou de cliquer sur son titre, pour se voir offrir une visite guidé. On se met alors à le suivre automatiquement. Le guide nous emmène dans les lieux les plus remarquables et nous donne des explications. Si on veut en savoir plus, il faut simplement demander. Ces guides constituent un moyen commode de visiter l’ensemble. Si on opte pour une visite individuelle, on peut alors compter sur des intendants prêts à nous renseigner sur ce que nous voyons, notamment sur les reconstitutions de scènes d’époques. Ces scènes sont pour l’instant centrées sur la personne de l’empereur, que l’on peut voir en train de lire des rapports officiels, de banqueter ou de se faire peindre.

L’empereur en train de lire des rapports

Comme l’ont montré certaines études, le musée est un lieu social. L’application de la Cité interdite permet de prendre en compte cette dimension: comme dans Second Life ou dans d’autres réseaux sociaux (en 3D ou non), il est possible de tchatter avec les autres visiteurs ou d’en faire ses amis. Il est également possible d’organiser soi-même un tour guidé. Cette fonctionnalité est vraiment intéressante, si l’on songe à des usages dans des écoles. Le professeur peut emmener ses élèves dans un tour guidée. On peut aussi donner rendez-vous à un ami dans la Cité interdite et la visiter en sa compagnie.

Il y a relativement peu de défauts à signaler. On peut constater de légères interférences entre le système de guidage de l’avatar et les informations disponibles en certains lieux: parfois on doit attendre un peu pour reprendre la main. Le principal bémol, c’est qu’il faut télécharger une application pour effectuer une visite. Les mondes 3D ne sont pas encore très interopérables.

Finalement ce genre d’application aurait été possible depuis longtemps. Elle l’était peut-être déjà, quand je pense au CD-Rom permettant de visiter le château de Versailles. A cette époque-là (fin des années nonante), les mondes 3D étaient liés uniquement aux jeux, ce qui dissuadait un public nombreux. Aujourd’hui, le paradigme est différent: un peu grâce à Second Life, la 3D a été déconnectée de l’idée de jeu. De plus, les réseaux sociaux sont passés par là. Il faut espérer que, dans un avenir proche, de nombreux monuments, palais, musées seront accessibles de cette manière.

Mon avatar

Bonne visite:

http://www.virtualforbiddencity.org/

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J’ai testé la Wii

J’ai profité de la visite d’une grande exposition commerciale consacrée au jeu et au jouet pour tester (enfin) la Wii. L’idée de cette console conçue par Nintendo m’a toujours paru intéressante. Le monde du jeu électronique est très marqué par l’informatique qui fait naître le mouvement d’un avatar à partir de commandes du clavier ou de manettes très simplifiées. Un bel exemple d’effet diligence. Ce mode de manipulation archaïque suppose un grand sens de l’abstraction. Mon avatar de Seconde Life en sait quelque chose, tant il s’est cogné dans des murs. Heureusement le système ne prévoit pas de faire apparaître des bosses sur le front.

Wii

Il a fallu attendre longtemps pour que l’on considère que le plus naturel est de mettre en parallèle le mouvement du corps humain réel avec celui de l’avatar. La Wii permet de jouer au tennis, au bowling, de faire du yoga ou de l’aérobic, grâce à divers accessoires. Il paraît que l’on a tendance à casser les meubles ou la télévision. Mais en même temps, on fait bouger son corps plutôt que de rester scotché derrière son écran. Et c’est tant mieux pour la santé. La Wii est sûrement une étape importante pour sortir la culture numérique de la logique de l’ordinateur.

J’essaie de convaincre ma progéniture pour que la console en question figure sur la liste envoyée au Père Noël. Je ne voudrais pas donner l’impression de l’acheter pour moi-même 😉 .

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Des mondes virtuels dans le navigateur

Second Life a déchaîné les passions, puis le soufflé est retombé. Il faut cependant croire que l’idée que les mondes 3D pouvaient s’imposer sur Internet a trotté dans les esprit de quelques uns. On voit apparaître maintenant de nouveaux mondes virtuels. Second Life avait ses propres concurrents: Active Worlds, There et d’autres mondes utilisant le même client qui commencent à se mettre en place (comme Open Sim). Mais la nouvelle génération des mondes virtuels qui apparaissent maintenant ont la particularité d’être intégrés directement dans les navigateurs Internet. Nous en avons testé deux.

Yoowalk ne nécessite aucune installation particulière, si ce n’est Flash (en principe déjà installé dans le navigateur). Ce monde virtuel, créé par une start up française, propose un avatar très simple, éditable, mais avec des choix réduits en ce qui concerne sa garde-robe. Cet avatar évolue dans un univers simple, fait de routes et de maisons cubiques, dans lesquelles il est possible d’entrer. Le monde est divisé en plusieurs pays (France, Canada, Brésil). On rencontre les maisons de plusieurs journaux ou enseignes connues. Chaque avatar a sa propre maison, qu’il peut décorer à sa guise avec un mobilier qui rivalise en simplicité avec une certaine marque suédoise.

Yoowalk - espace personnel

Disons-le, ce monde ne fait pas très envie. Il se comporte un peu comme Habbo Hotel, mais en nettement moins bien. Le design est un peu fade. L’idée d’aller lire les articles du Monde sur des murs ne fait guère envie.

Yoowalk

Bien entendu, les fonctionnalités classiques du chat sont disponibles.

Google vient de sortir son monde virtuel, en préparation depuis un certain temps comme des rumeurs insistantes le laissait penser. Lively est donc d’un tout autre calibre. Il nécessite cependant l’installation d’un plug in dont la version Mac n’est pas encore disponible. Le choix d’avatars est limité: il y en a une dizaine. Ils sont vraiment en 3D et donnent une belle impression de volume.

Lively

En revanche, la garde-robe disponible est plus riche et, pour l’instant, gratuite.

Lively - wardrobe

Chaque avatar peut construire son espace (room); il peut même en faire plusieurs. Il peut remplir cet espace avec le mobilier fourni gratuitement, dont le choix est assez vaste. En passant, on peut signaler que l’inventaire est divisé en catégories d’objets et donc assez facile à gérer (les résidents de Second Life me comprendront). Le déplacement de l’avatar, au moyen de la souris, est aussi agréable. Contrairement à Yoowalk, Lively ne forme pas à un monde dans lequel on peut se déplacer à sa guise dans des rues. Il faut toujours accéder à un espace par le truchement d’une page Web. En revanche, il est possible d’intégrer à sa propre page Web l’accès à son espace virtuel dans Lively. Voici la porte qui conduit chez moi:

http://embed.lively.com/iframe?rid=-6720215638888457341

Lively dispose aussi des fonctionnalités de chat.

Si ces deux mondes virtuels permettent aux utilisateurs d’aménager leurs propres espaces, ils ne permettent pas encore de créer des objets ou des bâtiments. Yoowalk cherche à créer un monde d’information dans lequel les avatars se déplacent, alors que Lively va plutôt dans la directement du réseau social.

L’avenir est certainement à l’intégration des mondes virtuels en 3D dans les navigateurs. A l’avenir, il ne devrait plus être nécessaire d’ouvrir un nouveau programme pour accéder à son espace virtuel et y discuter avec ses amis. De plus, un compte chez Google donne accès à un nombre impressionnant de services, de la messagerie au bureau virtuel, en passant par un monde 3D. On n’est pas loin du « all-in-one » desk.

http://www.yoowalk.com/

http://www.lively.com/