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La Bibliothèque numérique mondiale

Une nouvelle bibliothèque numérique à vocation universelle vient de s’ouvrir sur le Net: la Bibliothèque numérique mondiale. Elle veut mettre à disposition des contenus multi-culturels, notamment dans un but éducatif et en vue de réduire la fracture numérique. Elle a été créée par l’UNESCO et la Bibliothèque du Congrès, en collaboration avec d’autres partenaires.

Bibliothèque numérique mondiale

Pour l’instant, elle ne compte que 1170 objets: des livres, des revues, des manuscrits, des cartes, des films, des gravures, des photographies et des enregistrements sonores. Ces documents proviennent de diverses époques, de l’Antiquité à nos jours, et de tous les continents. Ils peuvent être recherchés par lieu, par période, par thème, par type d’élément, par institution.

Bibliothèque numérique mondiale

Bibliothèque numérique mondiale

La bibliothèque numérique dispose aussi d’un outil de visualisation permettant de naviguer à l’intérieur des documents et pourvu d’une fonctionnalité de zoom que l’on peut activer avec la roulette de la souris.

Bibliothèque numérique mondiale

Le moteur de recherche permet d’affiner les résultats grâce à des méta-données. Des boutons permettent de partager les diverses ressources sur des sites de social bookmarking.

Espérons que cette bibliothèque s’enrichira rapidement …

http://www.wdl.org/fr/

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3D Hypermonde Musée virtuel Second Life

Cocon virtuel

Imaginez un cocon géant noir dans lequel on peut entrer et s’immerger dans des mondes virtuels divers. Plus besoin d’écran, de clavier, de souris. Tout est intuitif. Une expérience holistique. C’est en tout cas ce que promet le projet Immersive Cocoon (ou i-Cocoon), encore au stade du prototype et directement inspiré du film Minority Report.

Immersive Cocoon

http://www.i-cocoon.com/

http://www.cnn.com/2008/TECH/09/11/immersive.cocoon/index.html

Différents usages sont envisagés: jeux, visites de musées, travail, sport, relaxation auxquels on pourrait ajouter l’enseignement, le shopping et les relations sociales.

Un autre projet propose un casque permettant de s’immerger dans un monde virtuel en ayant les cinq sens en éveil (et non pas seulement la vue et l’ouïe). Dans ce casque, on verra des images, on entendra du son en vidéo, on sentira des odeurs, des goûts et même des sensations comme la chaleur ou l’humidité.

http://digital.warwick.ac.uk/News/towards-real-virtuality.html

Avec un tel casque, il sera possible de visiter un lieu lointain ou une époque passée, en se sentant en parfaite immersion.

Passons sur les désillusions possibles: les odeurs d’une ville du Moyen-Âge ou des couloirs de Versailles ne constitueront certainement pas le meilleur de l’expérience. Ces projets montrent une évolution intéressante dans le domaine de l’interface: l’ordinateur avec le clavier, l’écran et la souris, n’est pas un moyen adéquat pour entrer dans un monde virtuel. D’autres systèmes doivent être développés. Alors qu’on se déplace toujours aussi péniblement dans Second Life avec des touches du clavier, la Playstation 3 permet déjà d’accéder dans un univers persistant appelé Home. L’idée d’un appareil dans lequel on peut entrer semble intéressante, même si on peut se demander une telle machine entrera facilement dans nos appartements exigus. Un casque paraît de ce point de vue plus intéressant, même si imaginer tous les membres d’un même ménage avec des casques sur la tête peut paraître un peu risible.

Si on peut se réjouir de l’évolution des interfaces, il faut peut-être s’interroger sur les contenus accessibles via ces interfaces. Les spectacles deviendront de plus en plus réalistes, mais cela ne signifie pourtant pas qu’ils seront vrais. Les mondes virtuels sont construits au moyen d’algorithmes et de diverses ressources numérisées comme des images, des sons, des vidéos. Cela ne semble pas poser trop de problème pour des jeux, du moment que l’utilisateur sait (ou reste conscient) qu’il joue. En revanche, quand il s’agit d’utiliser ces systèmes pour visiter des périodes du passé, cela pose plus de problèmes. Les images diffusées ne seront toujours que des reconstitutions qui peuvent en tout temps être remises en question par des découvertes ou de nouvelles méthodes. Mais l’impression que ces images font dans une situation d’immersion rend cette critique difficile.

Les futurs visiteurs des mondes virtuels seront peut-être comme les hommes attachés dans le fond de la caverne de Platon, qui contemplent les reflets de la réalité projetés sur le mur de la grotte. Plus ils passeront du temps dans ces mondes artificiels, plus ces derniers feront partie de leur réalité et finiront par se confondre avec elle.

Allégorie de la caverne

Platon nous dit bien que la difficulté surgit quand on détache l’un des ces hommes pour l’exposer à la lumière du jour: l’expérience est douloureuse et l’individu doit s’habituer à cette lumière aveuglante. Comment se fera le passage du monde virtuel vers le monde réel pour ceux qui y passeront beaucoup de temps, par exemple pour le travail, les relations sociales et les loisirs? Que sera leur rapport avec le monde réel, beaucoup plus contraignant?

Toutefois je ne pense pas qu’il faille renoncer à ces univers persistants en 3 dimensions. Ils ont beaucoup d’avantages. Néanmoins il est nécessaire d’apprendre à les utiliser et à s’en servir de manière cohérente. L’idée d’avoir chez soi (ou d’habiter) un cocon qui reconstruit autour de soi le monde et dispense de s’y aventurer réellement fait un peu peur. En revanche d’avoir de tels cocons dans des lieux publics, comme des musées ou des bibliothèques, me semble plus sain.

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Musée virtuel muséographie virtuelle

Le musée en ligne

J’ai participé en tant qu’intervenante dans un atelier lors des premières Assises du Réseau romand Science et Cité. L’atelier pour lequel je devais faire un des exposés introductifs destiné à lancer la discussion et qui avait pour thème « Virtualités: musées virtuels et présence muséale sur Internet » a été précédé d’un exposé lumineux de François Mairesse. Ce grand spécialiste des musées a montré combien le musée d’aujourd’hui pouvait se décliner en diverses combinaisons, à partir d’idées et de contestations issues des années 1960-70. Des musées vitrines aux musées expériences, des musées bricolés aux musées d’architecte qui font oublier le contenu à leurs visiteurs, des musées au discours autoritaire aux musées participatifs, des musées réels aux musées numériques. Ainsi le musée, en tant que forme, est bien virtuel et chaque musée que nous visitons en constitue une actualisation possible.

De mon côté, j’ai soumis l’idée de l’émergence d’une nouvelle muséalité sur Internet, basée sur des pratiques différentes issues de la culture numérique. Une sorte de muséalité parallèle à celle des musées de briques et de ciment. La muséalité est une attitude humaine fondamentale qui vise à choisir des objets de la réalité pour leur attribuer un sens particulier. Cette attitude explique par exemple la tendance à la collection et à la conservation d’objets: bibelots dans une boîte en fer blanc ou souvenirs de familles pieusement conservés dans un grenier. Les sociétés elles-mêmes collectionnent à travers leurs musées, leurs archives et leurs bibliothèques.

Le support a des conséquences importantes sur les pratiques. Si une muséalité émerge dans le monde numérique, elle sera influencée par la nature des technologies numériques. Ces dernières sont basées sur trois piliers:

  • La numérisation
  • L’algorithmique
  • La mise en réseau

La numérisation est un processus réduisant les contenus en langage binaire. Dans la réalité sensible, ces contenus apparaissent comme très différents : image, son, texte. Mais pour un ordinateur, ils ne sont qu’une suite de 0 et de 1.
Un algorithme est un énoncé dans un langage bien défini d’une suite d’opérations permettant de donner la réponse à un problème. On trouve des algorithmes s’appliquant à divers objets : compression de données, tri, cryptographie, graphes, graphisme, génie logiciel, mathématiques, texte. En termes plus clairs, l’algorithmique permet de manipuler les contenus numériques, par exemple en les identifiant (moteur de recherche), en les modifiant (transformations graphiques), en les remixant (logiciels de montage vidéo).
La mise en réseau consiste à tisser des liens entre différentes machines. Les données sont stockées de manière décentralisée, mais accessibles de tout autre point sur le réseau. Il existe aujourd’hui plusieurs réseaux : Internet, les réseaux téléphoniques, les réseaux de télévision. Pratiquement toute les contenus circulant sur ces réseaux sont numériques maintenant.
Ces trois piliers des technologies de l’information affectent profondément les contenus qu’elles traitent. Un des effets les plus importants est la suppression de la notion d’original. Dans le domaine de la photographie numérique, un fichier peut être copié sans aucune perte de qualité. De nombreuses bibliothèques ont conservé des manuscrits d’écrivain et ces documents ont été très étudiés, car ils permettaient de mieux comprendre la démarche de l’auteur. Ces documents n’existent plus (ou de moins en moins) pour les écrivains de notre siècle. Le recours au traitement de texte rend difficile ce type d’études. En revanche, tout l’historique du travail collaboratif de Wikipédia est visible et accessible (et la consultation de ces historiques est parfois hautement intéressante). Il n’y a donc plus d’original dans le monde numérique (ou alors il doit être créé artificiellement, comme on le voit parfois dans Second Life). Le succès se mesure plutôt à la copie, à la diffusion et à la réutilisation des fichiers dans le monde numérique. Les internautes adorent s’envoyer des fichiers numériques ou les republier sur leurs blogs. Ils aiment retravailler les ressources numériques et les remixer.

Il est certainement trop tôt pour dégager les grandes lignes d’une muséalité en ligne, mais on peut déjà esquisser quelques tendances déjà existantes aujourd’hui sur diverses plateformes comme la blogosphère, le Web collaboratif (comme Wikipédia), les sites de partage de fichiers images, audio ou vidéo, les réseaux sociaux, les univers persistants en 3D:

  • La copie qui permet de s’approprier une œuvre, de la diffuser.
  • Le partage a été popularisé par les plateformes peer to peer. C’est devenu une philosophie. Les licences Creative Commons sont très utilisées pour permettre aux autres d’utiliser ses propres créations, avec ou sans citation.
  • La transformation est devenue un élément essentiel de la création, comme on le voit surtout dans le domaine musical. Des morceaux de musique sont mis à disposition des internautes qui peuvent ensuite les remixer. On peut parler de co-création ou de création collective.
  • L’indexation est une pratique plus pointue, mais très présente sur le Web sous la forme d’indexation sociale ou folksonomy. Elle consiste à attribuer des mots-clés à des objets en ligne. Cette pratique peu visible est pourtant essentielle pour l’amélioration de l’accès aux contenus, notamment les contenus non textuels.
  • L’ouverture des systèmes (mash up, API) permet d’utiliser diverses sources pour créer une mise en valeur des contenus. C’est le cas, par exemple, de cartes dynamiques créées avec des systèmes cartographiques ouverts.

Olivier Glassey a présenté aussi un exposé consacré à la folksonomy ou indexation sociale. C’est une pratique très visible dans un site comme Flickr et c’est un des principaux outils permettant d’exploiter les 3 milliards du site. Il a évoqué le projet Steve, dont le but est d’étudier la pratique de l’indexation sociale sur des sites de musées. Il a relevé que 90% des concepts entrés par les internautes ne font pas partie de la documentation du musée.

Dans la discussion qui a suivi, il y a peut-être trois points à relever:

  • l’effet diligence du transfert des musées actuels dans le monde numérique
  • la question de l’original
  • la question de l’autorité et du rôle du musée dans la diffusion du patrimoine

L’effet diligence du transfert des musées actuels dans le monde numérique

Le transfert des musées sur Internet n’est pas aussi évident qu’on le pense. Des investissements sont consentis et l’intérêt du public n’est pas forcément là. Une des raisons pouvant expliquer cette situation est certainement l’effet diligence. Dans l’histoire des techniques, on a remarqué qu’une innovation reste imprégnée de la technologie qu’elle remplace. Ainsi les premiers wagons de chemin de fer ressemblaient-ils à des diligences.

Internet a généré son propre langage et ses propres codes. Une muséographie en ligne doit s’adapter aux habitudes des internautes et non l’inverse. Cela nécessite un travail de réflexion important et de meilleures connaissances des technologies de l’information de la part des professionnels des musées. Dans mes observations des sites de musées, je relève souvent la platitude des applications ludo-éducatives pour les enfants, qui n’offrent aucune comparaison possible avec ce que ces mêmes enfants expérimentent sur leur ordinateur ou leur console de jeux.

L’original

Le rôle premier des musées est la conservation des oeuvres et objets pouvant témoigner des activités humaines, mais aussi de la nature. Ce rôle se complique maintenant par la notion de patrimoine immatériel. S’il n’y a aucun doute sur la nécessité de conserver des oeuvres et des objets, on peut en revanche se demander si seul l’original est digne d’être vu. C’est certainement une conception culturelle qui varie avec l’âge et les cultures, tout comme les modes de jouissance de l’art sont différentes selon les aires culturelles. La copie a été la norme pendant longtemps, comme en témoignent les musées des moulages. Elle revient aujourd’hui à travers des expositions comme celle qui reconstituait la tombe de Toutankhamon. Il est difficile de savoir pourquoi notre époque attache autant d’importance à l’original. Peut-être que l’aisance matérielle dans laquelle nous baignons nous fait-elle désirer des objets authentiques. Peut-être également que la facilité de se déplacer nous fait-elle préférer l’original à la copie. Pourtant quand je me rends dans des musées, j’ai le sentiment que les visiteurs viennent y faire leur copie personnelle, munis d’appareils photographiques et de caméscopes, pour en jouir plus tard, chez eux, en famille ou avec des amis, ou même sur Internet, sur des sites de partage. Le terme « museum »apparaît dans le nuage de mots-clés les plus populaires , ce qui signifie que le musée fait partie des lieux où l’on prend des photos.

Du reste, tous les musées ne travaillent pas avec des pièces uniques originales : c’est essentiellement le cas des musées d’art et d’histoire. Les musées vivants commes les jardins botaniques ou les zoos montrent essentiellement les individus issus de lignées. Les musées d’archéologie et d’anthropologie ont souvent des objets qui appartiennent eux-mêmes à des séries, notamment les objets de la vie quotidienne, mais aussi des objets de rituel. Les objets uniques sont souvent liés à la création artistique. Mais même dans ce domaine, on a souvent affaire à des copies anciennes : c’est le cas de beaucoup de statues grecques qui ont été copiées à l’époque romaine.

La question de l’autorité et du rôle du musée dans la diffusion du patrimoine

La participation et la collaboration sont la norme dans le Web d’aujourd’hui. Les internautes peuvent aussi bien apporter des contenus nouveaux que commenter ceux qui existent. Leurs traces sont également souvent utilisés pour mieux hiérarchiser les contenus (les plus vus ayant souvent la meilleure place). Internet offre donc un grand contraste avec la manière dont les musées conçoivent leur rôle de médiateur. Le visiteur est rarement invité à parler (ou seulement dans le cadre d’enquêtes de satisfaction).

Le musée sur Internet peut-il être 2.0, c’est-à-dire participatif? La réponse à cette question demande quelques nuances, étant donné que, dans bien des cas, il n’est pas possible d’éliminer le rôle des personnes compétentes dans la médiation. Que peut-on demander aux visiteurs des sites?

– donner leur vision de la matière concernée comme alternative à la vision interne aux musées. On a vu que dans les expériences d’indexation sociale, 90% des termes saisis par les internautes ne sont pas dans la documentation des musées. Cette vision extérieure permettra sans doute aux musées d’améliorer l’accès aux objets des collections et leur présentation. Si le terme « hydrie » ne dit plus rien au public d’aujourd’hui, autant employer celui de carafe (puis préciser dans une notice).

– brasser les collections et faire de nouveaux choix. Le choix des oeuvres, des objets, des sujets d’intérêt est soumis à une certaine inertie. Laisser le public accéder à l’ensemble des collections peut permettre de faire remonter quelques oeuvres à la surface. Ce phénomène a été observé sur Amazon: les commentaires des utilisateurs mentionnant des ouvrages plus anciens sur le même sujet que le livre recherché ont relancé la vente de ces ouvrages.

– laisser le public poser les questions et organiser les réponses grâce à un réseau de personnes compétentes.Le site TSR Découvertes est une excellente illustration de cette méthode (http://www.tsrdecouverte.ch/).

– ouvrir à un plus grand nombre de personnes la possibilité de devenir curateur ou commissaire d’exposition. Beaucoup de personnes rêvent de travailler dans un musée et en ont les compétences. Les technologies de l’information permettent de créer un musée virtuel en ligne à peu de frais.

On le voit bien, le musée 2.0 n’est pas forcément aussi radical qu’on l’imagine. Il instaure simplement une meilleure interaction entre les visiteurs et les musées.

Pour terminer, il faut peut-être noter que dans le monde des bibliothèques, la transition vers les technologies de l’information se fait sans accroc. On peut accéder aussi bien aux références des ouvrages qu’à une partie des ouvrages eux-mêmes. Et personne ne doute du bénéfice que cela peut apporter. Pour s’en donner une idée, il faut aller consulter la bibliothèques de manuscrits e-codices:

http://www.e-codices.unifr.ch/fr

Site des Assises du Réseau romand Science et Cité : http://www.rezoscience.ch/rp/sc/assises.html

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Musée virtuel muséographie virtuelle Tendances Usages Web sémantique

Les multiples facettes de la réalité

Aujourd’hui, en faisant mes courses dans les rayons d’une enseigne connue, je me suis mise à la recherche d’allumettes. Spontanément, je me suis rendue au rayon des bougies en pensant que les allumettes ne devraient pas en être éloignées. Mais je n’en ai pas vues. Le rayon des caquelons à fondue étant juste à côté, j’y ai jeté un oeil, sans succès. Je me suis donc résignée à demander l’aide d’une vendeuse. Cette dernière m’a entraînée vers le rayon des … piles électriques. C’est là que se trouvaient les boîtes d’allumettes.

Je me suis donc demandée quelle était la caractéristique commune des piles électriques et des allumettes. L’énergie … pardi! Historiquement, les plaques électriques ont remplacé la cuisinière à bois et les torches électriques ont succédé aux chandelles.

Allumettes

Image: fedecomite

En passant, j’ai remarqué que les boîtes d’allumettes que j’avais mises dans mon panier étaient ornées d’images de sites archéologiques fameux. Encore un exemple de muséographie nomade non exploitée …

Revenons cependant à notre quête d’allumettes. Nous avons procédé par association d’idées en reliant l’allumette à ce qu’elle peut allumer, plutôt qu’à sa fonction générique de source d’énergie. Autant de clients dans un magasin, autant d’associations différentes. Les supermarchés ont tendance à séparer les produits, plutôt que de les associer selon leur usage. Il faut dire que l’espace-temps est une dimension difficile à gérer et qu’un objet ne peut pas être à deux endroits en même temps. C’est justement la grande différence entre le monde que nous connaissons dans notre expérience quotidienne et le monde numérique où l’ubiquité est possible.

La navigation des sites Internet peut se montrer aussi contraignante que l’organisation des rayons d’un supermarché. Il lui ajouter aux objets numériques des méta-données, c’est-à-dire des informations qui les décrivent, pour en augmenter le dynamisme. Les produits que l’on trouve dans les magasins comportent de nombreuses informations, comme le prix, la composition, le mode d’emploi. Mais ces informations sont directement imprimées sur l’emballage ou sur une étiquette. Il faut avoir le produit en main pour les lire (et souvent de bonnes lunettes ainsi qu’un diplôme de chimiste). Il en va tout autrement dans le monde numérique où ces informations sont exploitables grâce à un moteur de recherche ou à tout autre programme. Il est possible de les utiliser pour construire la navigation des sites et donner des accès différents dans une même masse d’informations. On appelle cela le faceting browsing. Dans une librairie en ligne, on peut chercher les articles selon divers critères: auteur, genre littéraire, éditeurs, etc… On peut ensuite trier les listes de résultats selon la date de parution ou le prix. Cela donne au consommateur plus de possibilités de trouver ce qu’il cherche et de tirer parti de ses propres associations d’idées.

Ne rencontre-t-on pas le même problème dans l’organisation des musées? Les tableaux, les sculptures, les objets ne peuvent se trouver qu’en un seul endroit. Le conservateur doit donc décider du meilleur endroit pour les pièces de ses collections. Mais dans des domaines aussi subjectifs que l’art, les logiques deviennent très personnelles. Faut-il adopter une logique chronologique, géographiques? Faut-il mettre les oeuvres d’un même peintre dans une salle ou privilégier une approche thématique? Certes, les expositions peuvent remédier temporairement à la situation. Mais globalement les visiteurs partagent tous la même vue des collections. C’est donc l’un des avantages des musées virtuels sur Internet. Ils sont nommés virtuels justement parce que chaque visiteur va générer une vue de la collection qui lui est propre. Les musées virtuels présentent le grand avantage de permettre autant de visites que de visiteurs et de laisser ces derniers découvrir des oeuvres selon leurs intérêts personnels.

L’indexation des contenus est une des clés de l’évolution future d’Internet. On la trouve finalement dans tous les domaines novateurs, à commencer par les réseaux sociaux dans lesquels les individus s’indexent eux-mêmes. Grâce à cette indexation, le visiteur ou l’utilisateur a beaucoup de flexibilité dans l’exploitation de collections, qu’il s’agisse de produits, de pièces de musées ou de personnes. C’est l’émergence du Web sémantique qui se prépare.

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Des détails invisibles à l’oeil nu

Grâce à Google Earth, il est possible d’observer des tableaux de maîtres dans leurs plus infimes détails. Certes, la fonction de zoom est très ancienne et on la trouve sur de nombreux sites Internet de musées ou consacrés à l’art. Mais Google offre deux avantages appréciables. Tout d’abord, il faut se rendre virtuellement dans le musée abritant l’oeuvre en parcourant la carte du monde avec le logiciel Google Earth.

Le Prado sur Google Earth

On arrive devant le bâtiment du musée reconstitué en 3 dimensions.

Le bâtiment du Prado reconstitué en 3 dimensions

A ce moment, on peut faire apparaître le menu présentant les tableaux disponibles.

Menu des tableaux disponibles

Une fois l’oeuvre choisie, le programme nous fait littéralement entrer dans le musée et nous pose devant le tableau. On regrette seulement de ne pas avoir d’avatar à disposition pour rendre cette expérience encore plus réaliste. La deuxième surprise nous attend devant le tableau: on peut naviguer sur sa surface et zoomer avec le même outillage que pour une carte de Google Maps. A noter qu’une équipe de Harvard a déjà utilisé ce système pour lire un manuscrit d’Homère.

Détail du tableau de Roger van der Weyden, Descente de la Croix

La résolution équivaut à 14’000 millions de pixels. La qualité de l’image est impressionnante et il est vraiment possible d’agrandir certains détails qu’on ne verrait pas à l’oeil nu. Les craquelures de la peinture apparaissent très nettement.

Descente de la Croix, Roger van der Weyden

Pour l’instant, seuls 14 tableaux du Musée du Prado à Madrid sont disponibles.

http://www.museodelprado.es/

Sur son blog, le critique d’art Jonathan Jones pose une question intéressante à propos de ce développement de Google, sans toutefois y répondre. Selon lui, une expérience muséale sur Internet ne remplacera jamais la visite du musée réel qui offre une atmosphère incomparable. Citant Walter Benjamin qui pensait que la reproduction mécanique des oeuvres d’art attaquait leur aura, il admet que la copie est au contraire un signe de succès. Cependant il se demande ce qu’il arrive quand la technique permet d’arriver à une qualité extraordinaire et à une diffusion sans limites (puisqu’accessible de partout).

http://www.guardian.co.uk/artanddesign/jonathanjonesblog/2009/jan/13/google-earth-prado

Peut-être que les technologies numériques sont en train de transformer l’expérience muséale en offrant d’autres visions de la réalité sensible. Songeons aux reconstitutions en 3 dimensions qui permettent une immersion. Elles constituent une véritable alternative à une maquette dans le domaine de l’archéologie par exemple. Songeons aussi à l’un des plus beaux musées de Second Life qui présente des reconstitutions en 3 dimensions de tableaux de Van Gogh. On peut y entrer, s’asseoir sur une chaise. Quant aux résolutions importantes de Google, elles nous permettent peut-être d’avoir un contact plus intime avec l’oeuvre. Chacun des détails que nous pouvons voir a fait l’objet d’un soin extrême de la part de l’artiste et c’est un peu comme si nous entrions dans son expérience. De plus, on peut voir le travail du temps sur le tableau, car chaque craquelure est visible.

Les technologies numériques nous offrent peut-être un regard renouvelé sur ces oeuvres et vont peut-être nous conduire à établir un autre rapport avec elles.

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Valoriser les contenus numériques

Quand on y réfléchit un peu, le fait de créer des musées, d’y mettre des objets, d’inviter les gens à venir les voir présente de nombreuses ressemblances avec ce que les historiens des religions appellent le sacré. Selon eux, la sacralisation est un processus qui consiste à conférer à un objet, un lieu, une personne une qualité, le sacré, qui lui donne une existence radicalement différente. L’objet, le lieu, la personne, une fois sacrés, ne peuvent plus être traités comme s’ils étaient profanes. Cependant, selon les cultures et les époques, le traitement de ce qui est sacré peut se présenter sous des formes très diverses, allant de l’adoration (le pharaon d’Egypte considéré comme un dieu vivant) à la destruction (le bouc émissaire), en passant par la mise à l’écart.

Louvre

Musée du Louvre – Photo Flickr

Il en va de même probablement de la muséalité, c’est-à-dire cette tendance très profonde de l’être humain autant que des sociétés humaines qui consiste à choisir des objets, à leur conférer un sens particulier et à les conserver. Mais la manière dont cette tendance se réalise (s’actualise) peut différer: certains deviennent collectionneurs d’art alors que d’autres se contentent de garder quelques bibelots dans une boîte en fer blanc. Des personnes passent du temps à faire des albums de photos ou bien conservent des souvenirs de famille dans leur grenier. Quand on passe au niveau de la société, le musée peut jouer un rôle analogue en conservant des objets, en leur donnant un sens particulier. Mais est-ce le seul moyen? On peut aussi se demander si les technologies de l’information ne modifient pas ces pratiques.

Pendant longtemps, nous avons considéré que les musées en ligne constituaient une alternative aux musées réels. Mais ces derniers n’ont pas à être remplacés. Ils jouent plusieurs rôles qui n’ont rien à voir avec leur mission première: lieu de rencontre, attraction touristique, élément d’urbanisme. En revanche, on constate tous les jours que les contenus numériques croissent de manière exponentielle. Si certains sont le résultat d’un processus de numérisation d’objets, de livres, de tableaux, d’autres sont nés numériques. Devant cette masse, le même processus qui a conduit à la création de nos musées peut se répéter. Si c’est le cas, les pratiques prendront des formes inédites, radicalement nouvelles.

Les disques durs remplacent nos greniers

Le développement de l’habitat urbain a pour conséquence de priver la plupart des gens de lieux propres à la conservation, comme les greniers et les caves. Il devient de plus en plus difficile de conserver des souvenirs de famille, de vieux objets sans réelle utilité, mais qui ont une valeur sentimentale. Même les albums photos prennent de la place dans les salles de séjour. En revanche, les disques durs de nos ordinateurs offrent de plus en plus de capacité de stockage. On peut y mettre ses photos numériques, son journal, mais aussi les musiques et les vidéos que l’on aime. Il est même déjà techniquement possible d’avoir un univers en 3D dans son disque dur. S’il est un endroit où l’on peut récréer un petit monde, c’est bien dans dans son ordinateur.

Dans les nuages

Peu à peu, ces contenus migrent vers les nuages. C’est ce qu’on appelle le cloud computing. De nombreux prestataires de service offrent la possibilité de télécharger ses contenus numériques sur des serveurs sur Internet, soit pour y accéder depuis plusieurs lieux, soit pour les partager avec ses amis ou ses parents, soit pour les ouvrir à tous.

Il s’agit véritablement de nouvelles pratiques de la muséalité. Elles sont basées sur la copie, la transformation, le remixage, l’indexation et le partage des documents numériques. De véritables lieux muséaux en ligne sont nés. Parmi eux, on peut mentionner le site Flickr, qui réunit plus de deux milliards d’images. Il ne s’agit pour autant pas d’un simple conglomérat d’images. Ces dernières sont aussi mises en valeur et une grande partie de ce travail de valorisation est fait par les utilisateurs du site. De fait, ce que nous pourrions considérer comme musée virtuel ne ressemble pas forcément à ce que nous appelons aujourd’hui musée.

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La trame du temps

La muséographie classique s’aventure parfois en dehors des musées et occupe certains espaces comme des passages sous-voies ou des halls de supermarché. Ces escapades l’obligent à repenser un peu la manière dont elle présente ses objets. Néanmoins elle reste dans son élément fondamental, à savoir un espace, un lieu. La muséographie virtuelle en ligne doit, elle, complètement réinventer la présentation de ses objets. Elle n’a pas forcément de lieu où s’exprimer et si espace il y a, c’est celui de l’écran d’un ordinateur ou alors un espace virtuel. La question n’est pas tant d’attirer les visiteurs dans un lieu que de susciter une curiosité qui les fera passer un peu de temps devant leur écran. Dans la muséographie virtuelle en ligne, le temps est un critère décisif. Le temps de l’Internet est devenu une suite de moments plutôt qu’un temps linéaire ou un temps cyclique. Néanmoins chacun de ces moments peut être caractérisé, soit par rapport au calendrier classique (saisons, fêtes, etc.), soit par rapport aux périodes de l’existence (enfance, parentalité, retraite, etc.). L’intérêt du visiteur potentiel peut donc être mobilisé par le biais de ces éléments temporels. De plus, comme ce visiteur n’a pas à se déplacer, il peut consacrer une série de moments à un projet muséal. Ainsi le calendrier, sous toutes ses formes, peut structurer une exposition, au même titre que l’espace dans un musée classique.

Depuis quelques années, nous nous sommes intéressés au calendrier de l’avent comme une forme intéressante de muséographie en ligne. Tout d’abord, il s’agit d’une tradition bien ancrée dans la culture occidentale. Ensuite, le calendrier de l’avent s’appuie sur l’impatience dans l’attente d’un moment fort. Une série de petites surprises est censée atténuer cette impatience pour le moment où l’on recevra une grande surprise. La surprise elle-même suscite la curiosité: que découvrira-t-on derrière une porte? Que verra-t-on demain? Nous avons mené plusieurs expériences avec des calendriers de l’avent. La première consistait à utiliser un blog et à publier chaque jour un texte littéraire en rapport avec Noël muni d’une page de calendrier. La seconde expérience est celle du Calendrier de l’AVANT qui joue sur l’homonymie avant-avent. Pour rappel, le terme avent signifie l’attente. Le Calendrier de l’AVANT, qui en est à sa deuxième année, présente des aspects du passé lointain de l’homme. Chaque jour, il met en avant une découverte, une conquête (1ère année) de l’homme ou bien s’intéresse aux aspects plus immatériels de son histoire, comme l’amour, le deuil, le plaisir (2ème année). Derrière chaque porte se cache un montage graphique muni d’un titre et d’un petit texte.

Exploration

http://www.be-virtual.ch/adventcalendar/

Les échos que nous avons eus de cette expérience est que les gens trouvent agréables d’acquérir (ou de rafraîchir) des connaissances sur le passé de l’homme sous cette forme, légère et amusante.

Nous avons aussi installé un autre calendrier de l’Avent dans Second Life. Le projet s’intitule « 24 Masters » et consiste à offrir 24 oeuvres picturales dont le thème est la Nativité: adoration des Mages, adoration des bergers. Les oeuvres proviennent du Moyen-Âge, de la Renaissance et de la période baroque. A côté de tableaux, on trouve aussi des enluminures de manuscrit et des dessins ainsi qu’un poème. Chaque oeuvre est accompagnée d’une brève notice. Visiblement quelques avatars cherchent à obtenir l’ensemble des oeuvres présentées. A la fin, les contenus de l’ensemble des portes seront disponibles.

Calendrier de l’Avent

SLURL: http://slurl.com/secondlife/Colonia%20Nova/56/163/38

En fait, tout ce qui est temporel se prête à un traitement muséographique en ligne. Les internautes sont prêts à visiter plusieurs fois un même endroit si une trame temporelle s’y déroule. Ils peuvent aussi être alertés par des fils de syndication et venir découvrir une nouveauté. La muséographie en ligne peut s’appuyer sur le rythme infernal de l’actualité sur Internet et utiliser les mêmes outils.

Un autre exemple de trame temporelle est la frise chronologique. On l’a déjà évoquée dans ce blog. Les sites muséaux l’ont déjà adoptée. La frise chronologique permet de présenter des oeuvres d’art ou des objets archéologiques sur une ligne qui correspond au temps. Mais on pourrait songer à d’autres formes comme le feuilleton. Du reste, le journal Le Temps lance ces jours un feuilleton consacré à un personnage méconnu de la grande histoire, Reynold Thiel:

http://www.letemps.ch/dossiers/2008thiel/

Le journal se réclame du genre du feuilleton, très en vogue dans la presse du 19ème siècle. Il faut avouer qu’Internet se prête particulièrement à un tel traitement.

Il est évident que la muséographie virtuelle en ligne induit un certain nombre de changements dans la présentation de ses objets. Le transfert d’une présentation dans l’espace à une trame temporelle en est un. Tout comme l’espace, le temps est porteur de dramatisation. Le théâtre classique ne réclamait-il pas cette unité de lieu et de temps, montrant par là une certaine équivalence de ces deux dimensions? Seul le théâtre est capable de les associer pleinement. Un musée réel est surtout un espace, mais la visite s’y déroule dans un laps de temps réduit. Le site Internet a l’espace étriqué de l’écran à sa disposition, mais il peut se développer dans le temps et même (avec un peu de programmation) jouer avec lui.

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Culture Musée virtuel muséographie virtuelle Second Life The Monastery Project

Second Mirror

Second Life donne à ses résidents une impression saisissante de réalisme. Alors que tout pourrait être fantaisie, les maisons et les infrastructures ressemblent beaucoup à ce qu’on voit dans le monde réel. On peut y acquérir l’équivalent en pixels de meubles, de vêtements, de véhicules. A la longue, on a l’impression qu’évoluer dans ce deuxième monde est assez semblable à vivre sa première vie. Pourtant certains signes ne devraient pas tromper. Que se passe-t-il par exemple quand on passe dans un miroir dans Second Life? Une chose extraordinaire qui ne devrait frapper notre imagination: le miroir ne réfléchit pas notre image. Il en va de même quand on se penche sur une surface d’eau ou bien quand on passe devant une surface vitrée.

Ce simple fait doit nous rappeler, si besoin est, que les mondes virtuels sont le fruits d’algorithmes programmés. Ils ont les caractéristiques du monde réel qu’on veut bien ou qu’on peut leur donner. Dans Second Life, la matière est une image de la matière réelle: elle n’en possède donc pas forcément les propriétés. Souvent les designer jouent sur des textures qui donnent une apparence identique. Mais des propriétés comme la réflexion des images ou les ombres devraient faire l’objet de développement dans le système lui-même. C’est du reste envisageable et on peut sûrement trouver des exemples de mondes virtuels avec des ombres ou des surfaces réfléchissantes. Cela peut par exemple être le cas dans le domaine des jeux sur ordinateur ou console, où le monde est plus limité et moins générique. Pour revenir à nos miroirs de Second Life, des designers ont tenté de réaliser des objets ayant la même fonctionnalité avec plus ou moins de bonheur.

Un bref retour sur une journée ordinaire montrera que nous sommes constamment soumis, dans le monde réel, à des surfaces réfléchissantes: à la maison, dans les restaurants, chez le coiffeur, etc… L’homme et son reflet ont une histoire complexe, remontant à l’époque où un humain s’est reconnu ou a reconnu l’un de ses semblables dans une mare. Divers contes et mythes montrent les relations complexes que l’homme entretient avec son miroir. La plus connue est probablement celle de Narcisse.

L’homme a essayé de construire des miroirs, tout d’abord en polissant la pierre, puis le métal. Puis le verre est arrivé. Si les miroirs de Second Life ne restituent pas notre image, Second Life constitue peut-être lui-même un reflet de notre propre. Le thème du miroir fait donc l’objet d’une exposition dans Second Life, plus exactement dans le Monastère du sim d’Alpine Meadow, sous le titre Second Mirror. L’exposition dans l’espace virtuel est doublée par un site Internet reprenant en partie sa scénographie.

Second Mirror - Affiche

SLURL: http://slurl.com/secondlife/Alpine%20Meadow/198/106/97

Site Internet: http://be-virtual.ch/mirrors/

Dans cette exposition, on peut s’immiscer dans trois fables ayant pour thème central un miroir ou une réflexion:

  • Narcisse qui tombe amoureux de sa propre image qu’il regarde sur une surface d’eau
  • La Méduse qui se pétrifie elle-même en croisant son regard dans son reflet sur le bouclier de Perseus
  • Blanche-Neige dont la belle-mère avait un miroir omniscient

Une saynète supplémentaire montre aussi le miroir brisé comme symbole de malheur: si un visiteur le casse par inadvertance, le miroir fait apparaître le message « 7 ans de malheur ».

Cette exposition permet aussi de se confronter à des miroirs semblables à ceux que nous confrontons dans notre quotidien, mais qui ne rendent aucune image. Le visiteur pourra aussi découvrir l’ingéniosité de certains développeurs qui ont tenté de tirer partie du système pour créer de pseudo-miroirs. Enfin, il découvrira les activités de résidents de Second Life qui se prennent en photos avec des surfaces supposées réfléchissantes, puis retravaillent ces images pour y ajouter un reflet. Deux oeuvres sont exposés, mais de nombreuses autres sont visibles sur Flickr:

http://www.flickr.com/groups/slmirrors/

Avatar and mirror

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Visiter la Cité interdite bis

Nous en avions parlé dans ce blog il y a plus de deux ans: la Chine projetait d’ouvrir une version en 3D de la Cité impériale, en collaboration avec IBM. C’est chose faite maintenant. Il est désormais possible de visiter le palais des empereurs chinois sous la forme d’un avatar, de déambuler dans les cours, les salles et les jardins. Pour l’instant, un tiers environ de l’ensemble est accessible. Pour visiter la Cité interdite, il faut télécharger une application disponible en version Windows, Mac et Linux. Pour ce qui est des langues, on a le chinois et l’anglais à choix. On peut entrer soit comme hôte, soit en créant un compte gratuit.

Vue de la Cité interdite

Le système ne déconcertera pas un utilisateur de Second Life, car certaines fonctionnalités sont semblables, notamment le déplacement de l’avatar avecles touches du clavier (en haut, en bas, à gauche, à droite). Les fonctions de caméra sont aussi très semblables. Il est aussi possible de prendre des images, les ranger dans son livre d’images ou les envoyerà un ami. Une carte est disponible, à partir de laquelle on peut se télécharger vers des lieux intéressants. La carte retient aussi le parcours du visiteur, ce qui est très utile dans ce labyrinthe.

Interface utilisateur

La réalisation est de qualité. Les différents éléments architecturaux sont présentés avec un grand détail. Des objets en 3 dimensions comme des statues, des vases, des braseros sont très réalistes aussi. Petit détail intéressant et qui diffère de l’univers de Second Life: l’avatar est suivi par son ombre.

Cette version 3D de la Cité interdite est conçue comme un musée. Elle a donc un certain nombre de fonctionnalités muséales. De nombreux lieux font l’objets d’une description détaillée, avec des images de la version réelle. Ces descriptions peuvent être appelées au moyen d’un clic. Mais dans cette Cité interdite, on a aussi des guides qui ont tout à fait l’apparence d’avatar et qui communiquent avec le visiteur au moyen du chat. Il suffit de s’approcher de l’un de ces guides ou de cliquer sur son titre, pour se voir offrir une visite guidé. On se met alors à le suivre automatiquement. Le guide nous emmène dans les lieux les plus remarquables et nous donne des explications. Si on veut en savoir plus, il faut simplement demander. Ces guides constituent un moyen commode de visiter l’ensemble. Si on opte pour une visite individuelle, on peut alors compter sur des intendants prêts à nous renseigner sur ce que nous voyons, notamment sur les reconstitutions de scènes d’époques. Ces scènes sont pour l’instant centrées sur la personne de l’empereur, que l’on peut voir en train de lire des rapports officiels, de banqueter ou de se faire peindre.

L’empereur en train de lire des rapports

Comme l’ont montré certaines études, le musée est un lieu social. L’application de la Cité interdite permet de prendre en compte cette dimension: comme dans Second Life ou dans d’autres réseaux sociaux (en 3D ou non), il est possible de tchatter avec les autres visiteurs ou d’en faire ses amis. Il est également possible d’organiser soi-même un tour guidé. Cette fonctionnalité est vraiment intéressante, si l’on songe à des usages dans des écoles. Le professeur peut emmener ses élèves dans un tour guidée. On peut aussi donner rendez-vous à un ami dans la Cité interdite et la visiter en sa compagnie.

Il y a relativement peu de défauts à signaler. On peut constater de légères interférences entre le système de guidage de l’avatar et les informations disponibles en certains lieux: parfois on doit attendre un peu pour reprendre la main. Le principal bémol, c’est qu’il faut télécharger une application pour effectuer une visite. Les mondes 3D ne sont pas encore très interopérables.

Finalement ce genre d’application aurait été possible depuis longtemps. Elle l’était peut-être déjà, quand je pense au CD-Rom permettant de visiter le château de Versailles. A cette époque-là (fin des années nonante), les mondes 3D étaient liés uniquement aux jeux, ce qui dissuadait un public nombreux. Aujourd’hui, le paradigme est différent: un peu grâce à Second Life, la 3D a été déconnectée de l’idée de jeu. De plus, les réseaux sociaux sont passés par là. Il faut espérer que, dans un avenir proche, de nombreux monuments, palais, musées seront accessibles de cette manière.

Mon avatar

Bonne visite:

http://www.virtualforbiddencity.org/

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Art numérique Culture Musée virtuel muséographie virtuelle

Expo nomade

Le terme « exposition virtuelle » peut recouvrir bien des choses. La Fondation Pro Helvetia, dont le but est de promouvoir la création artistique suisse à l’extérieur du pays, a trouvé un moyen intéressant de virtualiser une série d’expositions. Ces expositions sont en principe installées dans des lieux réels (non sur un serveur Web) et visitées par des visiteurs tout aussi réels (qui ne viennent pas sous forme de numéro IP). Alors! quoi de virtuel? Le mode de distribution tout simplement. Ces expositions sont avant tout des produits numériques. Elles sont disponibles sur un site Internet et sur un CD-Rom (pour la version haute résolution), prêtes à être imprimées et fixées sur des panneaux, en n’importe quel lieu de la Terre.

http://www3.pro-helvetia.ch/expo/list_exp.html

Parmi les expositions disponibles, l’une a été présentée lors du Festival international du film fantastique de Neuchâtel (NIFFF), dans le cadre de son symposium « Imaging the Future ». Elle présente les artistes suisses engagés dans des réalisations hollywoodiennes.

Affiche Swiss Designers in Hollywood

http://www.imagingthefuture.ch/2008/home.html

Entre nous, la présentation de ces expositions sur le site de Pro Helvetia n’est guère optimale. Il n’y a pas de système de navigation constant (il faut user du bouton « Back »). La mise en page n’est pas vraiment attractive. Mais il s’agit incontestablement d’un système original permettant de faire voyager des expositions autour du monde, sans camions ni polices d’assurance. Un exemple à suivre…